Bonjour les amis du Blog. Est ce le manque de soleil qui m'a fait déserter le Blog ?... Peut être, mais pas sûr. Est ce le ciel gris et humide sous lequel nous vivons depuis quelques mois déjà qui m'a fait oublier la chaude lumière de Marrakech? Encore pas certain. Est ce plutôt une flegme persistante et des tas de travaux d'intérieur qui m'ont détourné de la rédaction d'un article sur le blog...Je ne serais pas franc en l'affirmant. Mais le principal n'est il pas que je sois là maintenant pour vous conter quelques lignes....
Tout d'abord..
Notre amie BLANDINE m'avait promis des photos de son séjour dans la belle ville rouge.. Elle a tenu parole et ça depuis déjà quelques semaines. Elle m'en avait même fait la remarque sur FB. Blandine je t'embrasse pour me faire pardonner..
Voici le cour résumé qui accompagne les photos..
Nous sommes partis en famille pour ce deuxième voyage au Maroc, qui nous a vu aller à Taroudant et Marrakech, en passant par Agadir et Essaouira;.
Toujours à la recherche des mes racines et en allant à la découverte aussi de nouveautés.
Nouveauté: à Marrakech, l'immeuble en construction qui remplacera le petit marché d'origine.
perennité de l'église des st Martyrs.
Redécouverte, enfin de l'intérieur du Lycée Victor HUGO où je n'avais pas pu entrer,il y a trois ans.
Puis passage devant l'entrée de la Mamounia.
Merci BLANDINE pour ces photos qui seront comme une piqure de rappel administrée à tous ceux qui n'y sont pas allé depuis longtemps.
J'ai aussi reçu un message par l'intermédiaire du "Contacter l'auteur" d'un ancien qui lui aussi aimerait retrouver des amis et discuter un peu de Marrakech. Voici son message:
Je suis un ancien de marrakech et voudrais retrouver mon passé.
Bonjour
Je m'appelle Michel Guyon, je suis né en 1951 et j'ai passé mon enfance à Marrakech de 1953 à 1962
Mon père travaillait au moyens généraux. Il est resté de 1952 à 1963 à Marrakech
J'étais à l'école primaire à la BA 707. J'ai un frère Jean qui est né en 49 et une soeur Anne-Marie qui est né en 1946. Nous étions tous les trois à Marrakech et nous habitions au bloc lomat à l'extérieur de la base
Je souhaiterais partager des souvenirs.
Cordialement. Michel
Bien sûr si l'une ou l'un d'entre vous se souvient de Michel et de ses frère et soeur, je serais heureux de vous mettre en contact avec lui....Alors à vos claviers après avoir ravivé vos mémoires....Pour moi, bien que sa soeur ANNE-MARIE soit de la même année que moi, j'avoue que je n'ai, comme ça, pas de souvenir particulier. Il faudrait sûrement que je vois une photo d'époque... Alors Michel si tu possèdes ce genre de documents dans une boite à chaussures, n'hésites pas, fais les moi parvenir....
En ce moment, d'autres amis y sont, à Marrakech, au soleil et au chaud.
Je leur souhaite un bon séjour et attends avec impatience (Ils ne vont pas être content) leur retour avec, je le souhaite, de nouvelles photos....Pourvu qu'elle n'ai pas oublié le chargeur de son appareil photo..
Mais maintenant je cède la place à Jacques qui continue à nous ravir avec le récit qu'il nous offre.. Ouille, j'allais écrire "Chaque semaine"..Il faudrait que je me domestique un peu pour assurer une continuité à ses écrits.. Merci JACQUES de ta patience....
Conserves d'abricot
Lorsque nous habitions Avenue Hassan II et qu'approchait l'été, nous fûmes étonnés de voir tous les soirs des groupes compacts de femmes en djellaba qui défilaient sur les larges trottoirs plantés de mûriers.
L'avenue faisait la liaison entre la Médina et la gare.
Or c'est en face de la gare que se trouvait le « quartier industriel », et les quelques usines et conserveries qui à l'époque constituaient l'essentiel des activités de production de la ville.
Ces femmes étaient les ouvrières des conserveries, notamment la conserverie Cartier qui produisait les confitures et fruits au sirop « Ouka », célèbres à Marrakech.
Encore que nous préférions la marque « Aïcha », que l'on retrouve de temps en temps dans nos supermarchés français, mais qui était produite à Meknès. Toute une adolescence à la confiture d'abricots « Aïcha », cela marque.
Grâce à des contacts avec la famille Cartier, nous fûmes invités un soir de pleine saison de production abricotière, à venir visiter l'usine.
Ce devait être ma première visite du monde industriel, et je devais avoir 14 ans à l'époque.
Il faisait passablement chaud, aussi la visite se fit-elle dans la soirée, à la fraîche. Sous la conduite du chef de production, nous entrâmes dans un immense hangar où se trouvaient les chaînes de conditionnement.
Notre entrée fut saluée par un chant de bienvenue entonné par toutes la centaine femmes qui travaillaient sur la chaîne. La fabrication était très largement manuelle du fait du coût de la main-d'oeuvre au Maroc, aussi pûmes nous observer la totalité des étapes.
D'un côté, arrivaient les abricots, déchargés par camions entiers. De l'autre les boîtes en fer blanc.
Les abricots étaient tout d'abord lavés et traités pour être débarrassés des produits chimiques de culture. Ils étaient ensuite calibrés, les moins conformes prenant la direction de la chaîne de confiture, les plus présentables celle de la chaîne de fruits au sirop.
Puis ils arrivaient sur une table vibrante où les ouvrières les prenaient, séparaient sur des couteaux fixes les deux oreillons et extrayaient le noyau. Leur vitesse et la précision de leurs gestes étaient la première étape de la qualité de la production. Quelques fruits gâtées étaient évacués à ce stade, et les oreillons reprenaient le tapis roulant pour la phase suivante.
Les oreillons étaient ensuite savamment rangés dans la boîte, et il fallait avoir le coup d'oeil car la boîte devant faire 1kg, il fallait bien doser. Ensuite, un minimum de dextérité était nécessaire pour éviter les bords coupants de la boîte.
Ce premier rangement était complété par quelques oreillons supplémentaires ajoutés par le contrôleur en fin de chaîne pour arriver au poids annoncé.
Puis, le sirop ajouté, le couvercle était serti et la boîte passée à la vapeur pour la cuisson. Cuisson légère pour les abricots au sirop, plus longue pour la confiture. Moi qui pensais que la confiture se faisait en chaudrons, je fus surpris de voir que fort logiquement cela se passait dans la boîte directement.
Une fois cuites, les boîtes descendaient avec un grand vacarme, accompagnées de jets de vapeur, dans une glissière inclinée avant de passer au lavage puis à l'étiquetage.
Ce poste était assez pénible du fait de la chaleur et du bruit, et le passage entre des deux lignes de cuisson m'avait particulièrement impressionné. L'enfer de Dante, m'étais-je dit alors que je passais rapidement sur l'escalier métallique, entouré de boîtes qui dévalaient le plan incliné.
Enfin, les boîtes étiquetées étaient rangées en cartons, plus faciles à manipuler pour les expéditions.
La visite se termina par l'aire de stockage des noyaux, impressionnante. On nous expliqua que les noyaux seraient brûlés dans la chaudière qui produisait la vapeur nécessaire à l'étuvage et à la stérilisation.
Les enfants que nous étions furent rêveurs devant le nombre de noyaux, quand on sait l'intérêt que revêtaient les noyaux pour les petits marrakchis à la saison des abricots : « A qui tire, dix noyaux » était le cri qui émaillait la cour de récréation de l'école du Guéliz quand nous arrivâmes.
Nous avions bien des préoccupations d'enfants à l'époque.
La Targa
Nous étions des citadins, et habitions dans un immeuble, non loin du Lycée Victor Hugo. Notre immeuble donnait de façon un peu lâche sur la route de La Targa, où nous nous déplacerions pour diverses activités.
Outre une visite des vergers de Soueilah, organisée par la Société des sciences naturelles de Marrakech et qui nous fit découvrir les différentes variétés d'agrumes, nous y eûmes des activités hippiques.
Je ne sais plus comment cela commença, mais l'envie vint à nos parents de nous faire faire une activité sportive, et ils virent en l'équitation quelque chose de tout à fait intéressant. Il est vrai que les conditions tarifaires des clubs hippiques au Maroc n'avaient rien à voir avec celles de France.
Sans doute par une relation de collègues à ma mère, nous pratiquâmes un certain temps sous la direction de M. Sabathier, ancien officier de cavalerie, qui adorait les chevaux, les femmes et sa Chevrolet « Impala » de 1959, celle dont l'arrière comportait de larges ailes horizontales. Il lui arrivait aussi, plus modestement, d'utiliser une 4CV Renault.
Dans un bled de la Targa, géré par un couple d'origine Italienne, il avait organisé un petit club. Quelques boxes, deux carrières régulièrement labourées pour que les chevaux puissent évoluer sur un sol suffisamment souple, quelques obstacles pour l'apprentissage du saut, et d'immenses terrains de promenade dans cette Targa agricole.
Nous commençâmes bien sûr par l'initiation, le travail en longe puis après quelque temps par le travail en reprise. Par groupes de cavaliers de force sensiblement égale, nous tournions dans la carrière et apprenions voltes, demi voltes, doublage, individuel ou successif. Le but était de nous faire acquérir un minimum de maîtrise dans la conduite du cheval.
Puis, progressivement, il nous initia à la promenade, à la montée et descente de raidillons et au slalom entre orangers.
Il pleuvait rarement, il faisait plus souvent chaud et nous rentrions fréquemment assoiffés après une heure passée en plein soleil. L'été, quand il faisait encore plus chaud, on montait le soir après six heures. On faisait aussi des promenades avec pique nique le dimanche, encore qu'il ne me souvienne pas d'y avoir participé.
Traditionnellement, après le retour aux boxes, il y avait dégustation de boissons autour du local « administratif » qui comportait une table et un gros réfrigérateur plein de Judor, Ricqlès et autres bières Stork ou Pils. Les bières, c'était pour les grands, les boissons non alcoolisées pour les petits que nous étions.
Le bled était à 7 km de la maison. Au début, consciencieusement, les parents nous y accompagnaient à tour de rôle.
Avec l'âge, vint la lassitude des parents et notre besoin d'indépendance. Nous commençâmes à nous rendre au club à vélo. Entre 14 km de vélo sur mon Liberia bleu ciel et une heure d'équitation, je rentrais complètement harassé, et je n'étais pas le seul. La sieste d'après-midi s'avérait alors indispensable.
Pour moi, l'aventure s'arrêta au retour d'un été en France. Dès notre arrivée à Marrakech et le retour de températures plus clémentes, les parents insistèrent pour que nous retournions à La Targa faire du cheval.
Un peu à contre coeur, angoissé, je repris le chemin du Club.
Gérant l'oisiveté des chevaux en ce début d'automne, M. Sabathier m'attribua un pur-sang du nom de Cherbourg, un peu caractériel il faut bien le dire. Le cheval, pas M. Sabathier. Nous partîmes en promenade, mon frère, M. Sabatier et moi, pour reprendre contact avec le cheval. Pour retrouver l'assiette, nous déchaussâmes les étriers.
A un moment donné, Cherbourg décida de partir de son propre chef. Ainsi que l'on chercha à me l'expliquer plus tard, une fois de plus, il fallait le tenir mais ne pas lui tirer sur le mors. Bref ce fut ma faute si l'abruti de canasson (il n'y a pas d'autre mot) décida de « m'embarquer ». Cela n'aurait pas dû poser de problème, même sans étriers au galop, bien assis, sauf que le terrain de course était traversé par un fossé d'irrigation que le cheval ne pouvait franchir au galop qu'en sautant
Voyant arriver l'obstacle, je me livrai à une rapide mais indispensable révision mentale de la technique du saut, apprise quatre mois plus tôt, sur des obstacles calibrés. Bon, en arrière, les rênes, pas le temps de s'accrocher et de toute façons c'est déjà trop tard et voilà Cherbourq qui saute au dessus de l'obstacle.
Je retombe un peu déséquilibré, et sans étriers c'est la chute douce mais inéluctable sur le côté.
Un grand choc, un nuage de poussière, de la terre plein les dents et les binocles trois mètres plus loin, comme d'habitude quand je me cassais la figure.
Le temps de les remettre, je vois M. Sabathier sur Tuc, son cheval, piquer des deux à la poursuite de Cherbourg, tout en criant à mon frère de rester là. Je me relève tant bien que mal, mais le pied a sérieusement trinqué, car je ne peux en poser que le talon. Je boitille jusqu'à nom frère, et remonte sur son cheval car je suis incapable de rentrer au club en marchant. M. Sabathier revient en ayant rattrapé Cherbourg, m'explique qu'il fallait le tenir, etc. et me félicite d'être remonté immédiatement. En fait, je le déçois un peu quand je lui explique que ce n'est pas par conviction mais par nécessité.
De retour au Club, M. Sabathier laisse mon vélo sur place et me ramène en voiture alors que mon frère rentre sur son vélo rouge. Le serrement de coeur de Maman quand elle rencontra dans l'escalier M. Sabathier qui redescendait de l'appartement !
Le lendemain matin, je ne pouvais plus poser le pied par terre. J'eus droit à une visite chez le Docteur, puis à une radio qui décela un « décollement épiphysaire », à savoir une tête d'os du pied (l'épiphyse) qui avait commencé à se séparer de la partie longiligne de l'os, la diaphyse.
Pas de béquilles, une semaine sans école, et utilisation d'une chaise pour poser le genou et me déplacer dans l'appartement.
En revenant au Lycée, je fus le héros du jour,affecté toutefois d'une légère claudication.
Mes prétentions de cavalier s'arrêtèrent là, mais mon frère continua et obtint même bien plus tard quelques distinctions.
Un second motif de fréquenter la Targa fut la villa que louèrent nos amis les Podevin.
Arrivés au Maroc comme enseignants dans le début des années 60, et tous deux enseignants au Lycée Hassan II, il avaient trois enfants de notre âge, ce qui fait que les sympathies s'établirent bien vite entre enfants et entre parents.
Ils étaient aisément identifiables à Marrakech, leur voiture étant une ID bleu ciel, immatriculée dans le Calvados. La plaque terminait par HY 14, ce qui fait que l'identification était sans équivoque.
Dans un premier temps, ils occupèrent la villa qui se situe dans le jardin Majorelle. Actuellement musée, cette maison d'habitation au sein d'une végétation luxuriante fut pour nous, enfants, un véritable paradis de jeux. Invités le soir, après la fermeture, nous avions toute la superficie du jardin pour courir et jouer à notre guise. Nous disposions ainsi des pelouses, allées et bassins, et nous imaginions au coeur de la nuit d'été marrakchie dans quelque pays exotique suivant les inspirations du moment.
Ma maladresse me valut, pour la première visite, un bain dans la pièce d'eau remplies de nénuphars en face de la maison, les garçons voulant me montrer les grenouilles, l'accès aux dits batraciens passant par le rebord immergé du bassin dont on avait omis de me signaler qu'il était particulièrement glissant. Je revins donc à la maison penaud et habillé de pied en cap par M. Podevin.
Les contraintes liées au fait que le jardin était ouvert au public en journée, ce qui les amenait à trouver des visiteurs sur leur terrasse, firent qu'après un certain temps, ils émigrèrent.
Ils louèrent une propriété à la Targa, qui avait été habitée par Maître Thierry, avocat, dont la fille avait été dans ma classe en quatrième.
La distance d'avec Marrakech fut résolue par l'achat massif de deux roues motorisés, une mobylette « jaune » et un solex « flandria », dont je me souviens particulièrement bien, ainsi que d'une renault 4 fourgonnette pour mettre le tout éventuellement.
Cette propriété comprenait une villa conséquente dont je garde peu de souvenirs il faut bien dire et une vaste piscine attenante, ce qui était beaucoup plus intéressant pour un garçon d'une quinzaine d'années. Elle était aussi ceinte d'une orangeraie, entretenue par quelques ouvriers.
L'entretien de celle-ci faisait partie des charges inhérentes à la propriété. Ce fut la mauvaise surprise, les traitements antifongiques divers ayant passablement entamé le capital de la famille, sans forcément se trouver remboursés à la vente des oranges. Enseignants et fermiers, ce fut une expérience étonnante pour eux.
De notre côté, nous apprécions la piscine, en fait le bassin d'irrigation puisque l'eau de celle-ci servait avant tout à irriguer les orangers.
Cette villa était souvent pour nous l'occasion d'un tour en vélo ou vélomoteur, l'éloignement n'étant pas un véritable obstacle et le proximité du club d'équitation où les enfants Podevin, tout comme mon frère, continuaient de pratiquer en faisait une halte intermédiaire intéressante.
A l'époque, je me déplaçais en Solex, cadeau emblématique de la réussite au Brevet.
Il m'arriva une mésaventure qui, avec le recul prit toute son ampleur. Un jour que je me rendais à la Targa juché sur mon solex, je fus entouré par une nuée de jeunes marocains conduisant des mobylettes, un peu dans le style de la « chevauchée sauvage ». Ils entamèrent la conversation en me demandant où j'allais, et si je ne voulais pas leur donner mon solex car l'un d'entre eux était juché sur le porte bagages de l'une des mobylettes. Je répondus bien entendu par la négative, et continuai ma route en affichant un sourire crispé et dépourvu d'aménité qui devait passer pour complètement niais. L'encerclement se poursuivant, j'étais en train d'envisager de filer tout droit dans le bas-côté en « tous terrains » (j'étais très fort à ce jeu là) mais la modestie de la cylindrée du solex et l'ambiguïté de cette fuite ne me séduisaient guère. J'empoignai alors le levier de relevage du moteur. J'avais en effet remarqué qu'en allégeant légèrement la pression du galet sur le pneu, le moteur tournait un peu mieux, et il me semblait que je gagnais en vitesse. Sous le regard étonné des jeunes m'entourant, le Solex n'alla pas plus vite, mais le spectacle d'un gamin binoclard juché sur un solex dont il tenait le moteur et qui malgré tout se traînait a dû faire pencher la balance en ma faveur : pourquoi risquer des ennuis en bastonnant un étranger à moitié débile pour récupérer un solex poussif dont le moteur était en train de tomber ? Finalement, ils se consultèrent d'un regard et m'abandonnèrent sur la route d'un coup d'accélérateur.
En rentrant de vacances, nous apprîmes une nouvelle stupéfiante : bien que locataires, les Podevin avaient été sommés de quitter les lieux toutes affaires cessantes, la marocanisation exigeant que les domaines agricoles ne soient plus détenus ou gérés par des européens. Dans l'été, ils avaient donc dû déménager et se retrouvaient dans deux appartements au cinquième étage en centre ville, dans l'immeuble qui abritait le centre culturel français. Ils mirent du temps à se remettre de cette péripétie, et nous aussi.
Plus tard, le temps d'un été, j'ai fréquenté la « boule targaouie ». J'étais revenu au Maroc après mon service militaire et nous avions passé quelques jours en bivouaquant chez les Lachèze qui avaient eu l'amabilité et la générosité de nous accueillir. Michel, mon frère, était à l'armée avec Jean-Pierre, le fils aîné Lacheze, et ils étaient venus avec deux copains, dont un à moto. De mon côté, avec deux copines et un copain, nous faisons le tour du Maroc. Cet été-là, la mode était à aller manger les brochettes au « frais », à la Targa. A côte du boulodrome, un petit restaurant servait brochettes et keftas, et c'était agréable de manger en plein air. Nous y trouvions aussi plusieurs « vieux marrakchis », qui, près de vingt ans après l'indépendance, étaient toujours là, attachés à « leur » ville. Dans la nuit chaude de l'été, en plein mois d'août, quelques insectes dansaient autour des ampoules, on respirait mieux qu'en ville. Quelques boulistes faisaient une partie à la lumière des lampes à arc, on y voyait comme en plein jour et la partie était animée. Sur la table, quelques verres d'anisette. Une langue fleurie et modulée, teintée d'intonations pied-noir. On se demandait si, ici, les choses avaient changé depuis les années cinquante.