Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité

Notre marrakech 45-70

Notre marrakech 45-70
Archives
Derniers commentaires
4 février 2014

Déjà 6 mois....

Bonjour à vous tous, mes amis Bloggeurs. BON.. il faut que la pause se termine...Ce n'est pas que j'aime me faire attendre, mais j'ai vraiement eu l'intention de fermer ce blog. Je ne l'ai pas fait car je savais qu'il pourrait encore servir à certains pour retrouver des amis. Ca a été le cas, puisque j'ai eu quelques lecteurs qui m'ont contacté directement pour que je leur donne des nouvelles ou des renseigements. J'en profite pour remercier Marcel et Michel de MANGINdeMARRAKECH pour leur aide et surtout leur mémoire indéfectible...

Nous avons entamé une nouvelle année. Je n'ai rien mis sur le blog, car j'ai adressé personnellement à chacun de vous mes voeux. Je suis légèrement pessimiste, puisque malgré mes bons voeux, il y a eu des malades, des accidents ou même des décès...Mais bon..La tradition..

En fait je n'ai toujours pas plus de choses à vous raconter qu'avant.. J'ai toujours l'impression d'avoir tout dit sur la période de nos jeunes années à Marrakech et comme je reçois peu de nouvelles photos ou de nouvelles anecdotes, je suis à sec devant ma page....

Oui quand même j'ai eu la joie d'avoir un contact avec un vieil ami (Vieil dans le sens que nous avons partagé pas mal de choses dans les années 60). J'ai retrouvé Bébert, le copain de Oualidia, du rugby, celui avec qui nous avons fait beaucoup de choses agréables et c'est agréable d'y repenser....J'espère aussi qu'il aura quelques photos à nous montrer...Bébert si tu me lis...

Aujourd'hui, je ne vais pas vous éditer un ou deux nouveaux chapitres du récit de Jacques (Pardon de t'avoir laissé en plan pendant si longtemps), mais je vais préparer les chapitres suivants et recommencer à vous les offrir.

Promis...

De plus j'ai aussi repris l'écriture des deux ou trois derniers chapitres de mon roman (Il a aussi connu une longue pause), c'est bien la preuve que l'envie d'écrire m'est revenu.

Alors ne désespérons pas..Votre Toujours Michel est de retour.... A très bientôt. 

 

 

Publicité
8 août 2013

UNE TRISTE NOUVELLE

Aujourd'hui, pas de MAN ANA, pas d'aventure  à raconter.

Juste vous faire savoir qu'une ancienne amie de Marrakech dont le nom est très connu de tous ceux qui ont vécu dans notre belle ville n'est plus.

En effet CHARLES MIRGON, un petit voisin de l'époque et ami de toujours, me fait savoir et me demande de vous informer que sa Soeur PAULE née en Septembre 1943 est décédée le 1° juillet dernier à LOS ANGELES où elle vivait.

N'ayant pas plus de précisions je ne peux que m'associer à vous, vous qui l'avez connu ou connu sa famille,  pour lui présenter toutes nos condoléances et l'assurer de mon amitié sincère..

Je profiterais de la fin de semaine pour continuer à éditer le MA ANA  de Jacques....A bientôt.
Votre toujours MICHEL

24 juillet 2013

MAN ANA 11, les abeilles et une grosse période "d'inactivité"

Ca arrive à tout le monde. Depuis 21 jours, chez nous, comme chez vous il fait beau et chaud (contrepèterie belge).

Alors le jardin,

IMG_1940

les longues soirées au frais sur la terrasse,

IMG_0950

les ballades très matinales avec le chien

SAM_1205

 

SAM_1223

Les séances photos à traquer notre Minou qui se réveille après une sieste à l'ombre

IMG_1985

puis qui retrouve mon fauteuil qu'il squatte pendant toute l'après midi, m'empéchant de m'asseoir devant mon PC

IMG_2003

ou les papillons qui viennent butiner nos fleurs

IMG_1992

et des séjours à la cave (c'est là qu'il fait le plus frais) dans mon atelier à bricoler un peu,

IMG_1979

J'ai offert cette abeille a mon voisin après qu'il soit venu récupérer un énorme esaim d'abeille venant de ses rûches et dont la jeune reine avait trouvé refuge dans notre pommier.

IMG_1852

IMG_1854

IMG_1855

IMG_1861

IMG_1866

Comme il a remarqué que j'étais intéressé par l'Apiculture, il m' invité à participer à une récolte du miel.

Je l'ai donc accompagné avec 50 rayons pleins de miel vers la cabane de son club où se trouve une centrifugeuse et ou nous avons recolté 90 kilos de miel. En voici quelques photos :

HONIG (2)

L'hôtel des abeilles recto,

HONIG (3)

et verso

HONIG (5)

Un rayon dont les alvéoles, fermées par de la cire, contiennet environ 3 kilos de miel

HONIG (6)

 

Cette cabane est construite au milieu de la fôret. Elle est à la disposition de la cinquantaine de privés qui possèdent des ruches dans notre région et qui peuvent l'utiliser lorsque le besoin se présente.

HONIG (10)

A l'intérieur, une centrifugeuse et tout le matériel nécessaire.

HONIG (15)

 

Il faut d'abord, à l'aide d'une raclette, retirer la cire pour libérer le miel

 

HONIG (17)

 

Puis comme pour l'alccol dans le vin, il faut mesurer le taux de sucre pour estimer la qualité du miel. Les derniers 20 jours de grand soleil et de chaleur ont fait progresser rapidement la teneur en sucre.   HONIG (19)  

On place ensuite quatre rayons dans la centrifugeuse et on fait tourner . Il y a un moteur.HONIG (21)

 

La première coulée, au goût et à la couleur, ce sera une bonne année.

 

 

HONIG (23)

De l'or liquide

HONIG (3+++)

Pendant que mon voisin s'occupe des 50 rayons je suis allé faire un tour dans les bois autour de la cabane et j'y ai trouvé des tas de rûches bourdonnantes d'abeilles en plein travail.

Les deux photos suivantes vous montrent la différence de miel que l'on peut trouver. La couleur est dépendante de ce que les abeilles ont butiné. Des fleurs ou de l'accacia

HONIG (25)

HONIG (26)

Voila, la récolte est finie, il faut tout nettoyer et tout remettre en place pour que les suivants puissent trouver un endroit propre et propice au travail...La présence est notée sur un cahier. Nous pouvons charger les seaux pleins de miels (3 pesant chacun30 kilos)

HONIG (28)

 

Mais tout n'est pas terminé. A la maison il faudra encore attendre plus d'une semaine pendant laquelle le miel sera touillé, popur faire remonter les petits morceaux de cire qui pourraient s'y trouver. Cette cire est gardée, car  elle servira pour fabriquer des bougies, après addition de parafine.

Voila, j'espère que ce court reportage sur l'activité de mon voisin vous aura plus et que vous comprendrez mieux pourquoi j'ai déserté le Blog et vous mes amis.

Alors pourquoi suis je de retour ce matin? Tout simplement parce que la vague orageuse est arrivée sur l'Est de la France et l'Ouest de l'Allemagne et qu'actuellement (9h30) il pleut, il tonne et le ciel se zébre d'éclairs....

 Je vais donc céder la place à Jacques et continuer, après lui avoir, ainsi qu'à vous chers lecteurs, présenter des excuses pour ce manque de continuité dans la publication de son récit, mais sans oublier de remercier mon autre ami Jacques pour ses dessins qui ont si bien illustrer son séjour à Marrakech.

 

Le Velosolex 

Le Vélosolex faisait partie des rites initiatiques des adolescents des années soixante. En fait, tout ce qui avait deux roues et était susceptible de vrombir recueillait l'adhésion immédiate des jeunes.

Au Maroc, le pouvoir d'achat était dans l'ensemble bien supérieur à ce qu'il était en France, mais les droits de douane étaient aussi fort élevés. L'achat d'un deux roues motorisé était somme toute une dépense, et les crédits quasiment inexistants et en tout cas très mal vus.

Malgré tout cela, les parents considéraient que la réussite au brevet des collèges, comme cela s'appelait à l'époque, me donnerait droit à un Vélosolex, qui était quand même le plus économique des deux roues motorisés de l'époque.

J'avais eu l'occasion de me familiariser avec le fonctionnement de ce type d'engin grâce à nos amis Podevin qui avaient investi massivement dans les deux roues (d'occasion pour certains) quand ils étaient à la Targa.

Sur les chemins de terre (on disait la piste), peu de risque de voir la maréchaussée contrôler l'âge des conducteurs, donc même avant 14 ans, nous conduisions ce type d'engins.

Je passai mon brevet en 1965, à quinze ans. J'avais plus de 14 ans, âge limite pour conduire un deux roues motorisé. Nous partîmes en vacances en France, et au retour, ce fut le passage par la boutique du concessionnaire, les établissements DUPART, non loin de la poste centrale de Marrakech. Il fallait traverser toute la ville, passer par la case « assurance » pour éviter de se faire confisquer l'engin par la police à l'occasion d'un contrôle inopiné, comme cela se pratiquait au Maroc où les gens ne prenaient pas d'assurance, préférant compter sur le Providence forcément divine. 

 

Je pris enfin livraison du tout dernier modèle de solex, le « 3300 » avec son phare carré et une calandre chromée rectangulaire qui en épousait la forme de façon moderne, rompant sur les anciens modèles aux phares ronds. Mes parents hésitèrent à me laisser traverser tout le Gueliz sur l'avenue Mohammed V, et je dus leur promettre de passer par de petites rues pour éviter la circulation.

 

Dès l'arrivée à l'immeuble, tous les enfants vinrent reluquer la bête, et après avoir détenu la vedette quelques minutes, je partis faire le tour des copains pour montrer l'engin. Ce jour là, le roi n'était pas mon cousin !

Je me servis énormément de cet engin pour mes loisirs, et je contribuai aussi à enrichir passablement le réparateur du coin (on disait « le cycliste »), une fois passée la période de garantie.

Au début, je ravitaillais exclusivement avec de la « Solexine », carburant spécial et hors de prix qu'il fallait aller chercher chez Dupart. Progressivement, j'alternai avec du mélange acheté à la station Shell du coin, dosé à 5 %. Il paraît que cela favorisait le calaminage.

Le Solex, conçu pour un climat européen, souffrait de plusieurs défauts assez gênants pour le Maroc. Tout d'abord, il avait horreur de la boue. Or toutes les routes n'étaient pas systématiquement asphaltées, et notamment dans le terrain vague qu'était l'Avenue de France devant la maison, on roulait sur un sol argileux.

De ce fait, le galet d'entrainement, recouvert d'une espèce de revêtement métallique rugueux, perdait de l'adhérence les interstices étant colmatés par la boue aussi dure que de la pierre une fois sèche. A l'occasion des visites périodiques, j'allais chez Dupart et l'ouvrier se livrait à tout un tas de contrôles minutieux, avant de vérifier sur le banc que le moteur tournait bien. En général, le moteur démarré, il saisissait une grosse râpe et la présentait devant le galet en rotation. Avec force poussière et étincelles, le galet était nettoyé, et la vitesse contrôlée sur le banc. Il fallait atteindre le chiffre de 33 km/h au minimum ! A chaque fois, j'avais l'impression de ressortir au volant d'un bolide.

Le second défaut était plus gênant : en été, la chaleur montait au-dessus de 35 et le moteur était refroidi par air. Il se produisait alors un phénomène de « vapor-lock », c'est à dire que l'essence se vaporisait dans le tubulure d'arrivée, et la pompe se désamorçait. Il convenait alors de laisser le moteur refroidir quelque peu, ou de changer la pompe, ce phénomène s'aggravant au fur et à mesure du vieillissement de celle-ci, semblait-il. J'aime la mécanique, mais uniquement quand les pannes ne sont pas des caprices. La solution passait par un démontage partiel des caches en plastique noir de façon à améliorer la circulation de l'air. Une seconde consistait à avoir dans une sacoche arrière une bouteille d'eau que l'on versait sur le moteur, ce qui le refroidissait et on pouvait repartir. C'était donc un modèle hybride, essence-eau à partir du mois de juin.

Une fois maîtrisé le problème de la conduite sur sol argileux humide (le moteur placé très haut rendait le véhicule particulièrement instable sur sol glissant, ce qui promettait des gamelles fabuleuses aux distraits), le plaisir du déplacement peu fatigant et rapide était au rendez-vous.

Le réseau routier, avec ses pistes, était toutefois éprouvant pour la mécanique. Il arrivait qu'un passage sur un cahot un peu plus marqué dans le terre sèche de la piste provoque le renversement de la boîte à outils et de tout ce qu'elle contenait : démonte pneus, rustines, clés plates, ainsi que de la pompe accrochées sous le porte bagages.

Régulièrement aussi, dans les mêmes circonstances, c'étaient les sacoches qui sortaient de leur logement et répandaient leur contenu, dont l'inévitable bidon de carburant qui permettait de ne pas rentrer en pédalant.

Ce solex me conduisit tout de même un dimanche après-midi au barrage Cavagnac (Lalla Takerkoust), tout seul. 70 km aller et retour ! Je fus évidemment repéré par des connaissances de mes parents, les Dupré, qui après s'être étonnés de mon périple en solitaire en parlèrent aux parents la semaine suivante. J'avais bien fait donc de leur présenter ma version dès leur retour, ce qui m'avait permis d'éviter des reproches trop durs.

Le Lycée Victor Hugo organisa un soir une « soirée des internes » où des externes appartenant à des clubs socio éducatifs furent conviés. Je décidai d'aller récupérer en ville une copine dont les parents avaient jugé qu'elle n'irait pas, suite aux dernières frasques je suppose.

Ma venue finit par les émouvoir et elle s'habilla en vitesse pour venir avec moi, juchée sur le porte-bagages. Pratique interdite si l'on n'avait pas l'assurance pour deux (difficilement vérifiable hors contrôle inopiné de la gendarmerie) et les repose-pieds arrière. Mais à cette heure là, et dans les petites rues, pas de casquette beige à l'horizon et nous arrivâmes comme une fleur au Lycée.

Sur le coup de minuit, ce fut le surveillant général qui nous rappela que l'heure de Cendrillon était arrivée, et nous fûmes invités à quitter le bal. 

 

Je ramenai donc la copine, mais le Solex avait une panne de lumière, aussi décidâmes nous d'éviter l'Avenue Mohammed V et de passer par des petites rues, parallèles. Au rond-point du Koutoubia, pas de bol, la police ! Stop ! Arrêt, et explications : la lumière ? Elle ne marche pas ! Vous allez où ? Je la ramène chez elle ! Sympa, le gendarme nous dit « bon, ben il faut marcher ». Et nous voilà partis à pieds sur quelques centaines de mètres, poussant le Solex. Le retour se fit sur le Solex, mais par un autre parcours où je ne rencontrai personne.

Les infractions ne se réduisaient pas toujours à si peu de chose.

Ainsi, un dimanche, les garnements que nous étions décidèrent d'égayer un peu l'après-midi. Nous étions dans notre période « dynamitero » et nous souhaitions nous livrer à quelques expériences pyrotechniques avec des pétards à mèche, comme nous disions. Le petit marché de la route de la Targa étant fermé, nous décidâmes de nous rendre en ville sur l'avenue Mohammed V, où la petite droguerie tenue par M. Gopaldas, surnommé « Courbette » en raison de son affabilité, était ouverte.

Nous voilà partis, mon frère sur son vélo rouge constamment trafiqué pour aller plus vite que tout le monde, mon ami Renaud sur la mobylette jaune de sa mère et moi-même sur mon Solex.

Arrivés devant le magasin, nous hissons nos vélos sur le trottoir, mettons les cyclomoteurs sur béquille et attachons le tout ensemble avec un antivol pour éviter un départ trop facile aux mains de quelque amateur.

A peine entrés dans le magasin, le fourgon « Type H » de la Police s'arrête, les portes arrières s'ouvrent, et en descendent trois agents qui se ruent sur nos vélos, « mal garés ». Suivant les jours, le recours à un gardien de vélo assermenté qui gérait un petit garage à vélos d'une dizaine d'emplacements était obligatoire, et laisser son vélo appuyé contre une colonne devant le magasin interdit.

A peine ai-je eu le temps de défaire l'antivol pour éviter que les engins soient maltraités qu'ils étaient jetés sans ménagements dans le fourgon, sans un mot d'explications. Penauds, retour à la maison.

Nous raccompagnons tout d'abord Renaud chez lui, qui se prend l'engueulade du siècle et dont la mère, qui a besoin de la mobylette pour aller travailler, lui signifie qu'il lui paiera le taxi sur ses (maigres) économies.

De retour à la maison, Papa est avec un ami professeur au Lycée et nous lui contons la mésaventure. Aussi sec, accompagné de son collègue, il nous embarque dans la voiture, petit détour par chez Renaud et direction le commissariat central, non loin du lycée Ibn Abbad.

Décidément en forme, le paternel se lance dans une diatribe où il explique que les vélos de ses enfants ont été ni plus ni moins que volés sur leurs yeux, qu'il les voit là dans la cour, et que ça va fumer.

Le gradé de permanence lui explique qu'il pourra les récupérer le lendemain, il repart de plus belle à tempêter que la mère de Renaud en a besoin pour aller travailler, que c'est du vol et qu'il a le fils du commissaire en classe, et que ça va mal aller pour lui. 

Il se dirige vers la porte quand le gradé lance « Arrêtez ! ». Les policiers dans le coin se retournent vers leur chef, et il y a cinq secondes de silence, durant lesquelles tout peut basculer. Finalement, le chef dit « quels sont vos vélos » ? Nous désignons les trois « deux roues », qui sur ordre du chef sont extraits du tas de vélos raflées cet après-midi là,  et nous sont remis. Nous sortons sous le salut des plantons, accompagnés des excuses du gradé de service.

Un grand soupir de soulagement, ponctué par une remarque du paternel : « vous voyez que maintenant, avec vos bêtises, il fait nuit ! Que mes enfants ne s'avisent pas de revenir avec une contravention pour défaut d'éclairage, parce que je reviens ! » Pourquoi faire à peu de frais ?

 

Nous rentrerons, escortés par la voiture familiale, sans payer la moindre amende ce qui était la règle dans ce cas de figure. Ce fut un peu plus compliqué d'expliquer à Papa pourquoi nous étions chez « Courbette » cet après-midi là !

Lors de mon départ en France, je léguai mon Solex à mon frère qui le maltraita quelque peu, surtout par un entretien désinvolte. Il termina ainsi un périple vers Agadir avec un copain avec le réservoir dessoudé dans les sacoches remorqué pendant presque 80 km. Retour par le bus de la SATAS, les solex dessus ! Quand on vous dit qu'il faut resserrer les boulons avant de partir !

 

Je pense que plusieurs d'entre vous vont sourire à la lecture de ce châpitre. Moi, je n'ai eu que quelques fois l'occasion de conduire celui de ma mère. Il lui était trop utile pour aller travailler pour que je puisse me montrer à mes copains sur cette engin à moteur. Et puis j'ai souvent envié ceux qui possédaient un "Mob", car elles étaient plus rapide que les "Solex". Quelques années plus tard nous avons régardé avec envie, les possesseurs de "Rumi" qui faisaient les KEK en passant dans un nuage de fumée et une pétarade bien reconnaissable devant les filles à la sortie du Collège....

Mais ça... C'était avant.

L'orage s'est calmé bien que le ciel reste gris et la température élevée..Il va certainement faire bien étouffant cet après midi....

Je vous souhaite à tous une bonne santé (en tous cas la meilleure possible) et je vous dis à bientôt en vous souhaitant également de bonnes vacances (pour ceux qui auront la chance d'en prendre). Votre toujours MICHEL

 

l'occasion

 

16 juin 2013

Un vieux carnet retrouvé

 

Vous allez vous questionner sur le titre de cet article. Qu'est ce qu'il va nous raconter, le Michel, sous un titre qui ne semble rien à voir avec Notre MARRAKECH.
 
Patience : Voici un préambule....
 
Vous avez sûrement tous vécu ce genre de désagrément. Un déménagement qui égare des papiers, des cartons de photos, des Bugs informatique qui font que votre PC ne fonctionne plus et que vous perdez une liste de contacts, des adresses d'amis que vous avez omis de noter sur le papier que vous avez perdu dans le déménagement sus cité...
Vous vous promettez de rechercher rapidement à reconstituer votre carnet d'adresses mais, le temps passe, les jours se remplacent à grande vitesse et vos amis qui, EUX, ont votre adresse ont aussi subi un problème informatique, un déménagement, une séparation, la venue de plusieurs enfants quileur bouffent le temps et surtout qui oublient de vous envoyer un courriel.
Ce n'est pas une recherche d'excuse, mais c'est ce qui m'est arrivé au cours des années passées.
Retour en arrière:
J'ai quitté Marrakech en juillet 1965, pour rejoindre la France et y retrouver un ami connu en 1964 dans les rues de cette belle ville qui nous a vu grandir. Oui, en 1964, avec ma guitare, mes cheveux que j'arrivais à garder un peu plus long que ce que mon père autorisait, mes amis, mes petites amies, mes copains de classe, mes partenaires de Rugby, les membres de notre petit orchestre,.....Oui c'est en 1964 que j'ai fait connaissance d'un beau gosse venu de France pour découvrir la grâce terrestre qu'était le MARRAKECH de ces années là. Il s'appelait Jacques... Jacques DEGENNE. Il dessinait tout ce qu'il voyait, faisait des tas de croquis, venait s'asseoir à la terrasse de la renaissance et son âme d'artiste m'avait donné envie de mieux le connaître...
 
Il a fait son année 1964-65 dans une ambiance qu'il faudrait que je vous raconte.. Mais ça on verra un peu plus tard...
 
Moi je suis parti à CASABLANCA, faire une dernière année d'étude et passer un Bac Technique Mathématique....Nous nous sommes retrouvés, Jacques et moi, lors de mes venues, en fin de semaine, chez mes parents. Ayant fait leur connaissance, il avait offert à ma maman un tableau qui se trouve certainement encore dans leur maison du Jura....
 
Il devait rentrer en France, moi je voulais y aller, pour découvrir Ma Mère Patrie et y faire mon service militaire....Nous nous sommes donnés rendez vous à Bordeaux où Jacques avait déposé, chez sa soeur, tout ce qu'il avait rapporté du Maroc. 
 
Suite d'un retour en arrière
Comment JACQUES est il rentré en France, je lui laisses la place pour vous le raconter.
 
Ma décison de rentrer en France est liée au doute qu'avait instillée dans ma tête, un peintre autrichien en vacances à la Mamounia sur la qualité de mon talent d'artiste.
Mon voyage et surtout la traverée de l'Espagne a été facilité par un amour du moment, une belle infirmière de l'Hopital de MARRAKECH qui partair à LILLE voir sa soeur.
 
Moi j'ai fait une partie du voyage en train, jusqu'à MADRID puis en stop, avec une jeune et jolie française (j'avais 19 ans et toutes les jeunes femmes m'étaient jolies) qui conduisait une décapotable et qui n'était pas rassurée de voyager seule sur les routes espagnoles. Nous avons donc cheminé de concert en trois étapes et deux nuits jusqu'à Bordeaux.
 
Nous nous sommes retrouvés Jacques et Moi et peu argentés nous avons décidé d'aller sur le bassin d'arcachon pour tenter d'y gagner un peu d'argent. A Andernos nous avons dormi sur la plage, faisant de la musique pour les touristes (féminines) qui passaient. Jacques dessinait à la craie sur les trottoirs et je massacrais quelques chansons d'Hugues Aufray sur ma 12 cordes...
 
Comment Jacques a t-il eu le renseignement, je ne le sais plus. Toujours est il qu'il a su que le camp de vacances de Montalivet qui ne s'appelait pas encore CLUB MED, mais je crois "Village de France" cherchait des saisonniers. Vu notre dégaine d'artistes soixantehuitards avant la lettre, nous avons été engagé tout de suite....Jacques a tout de suite pris la responsabilité de la fabrication  des décors du club et moi, je suis passé de responsable d'un ilôt de tentes et de bungalows (c'est à dire, veiller à ce que les vacanciers aient tout ce dont ils avaient besoin), à employé à la cuisine où nous préparions des centaines de repas servis en plats de 8 personnes et quelques soirées où j'ai assuré l'animation. Entre temps, Jacques faisait dans la journée des décors pour les différentes activités du soir ou de l'après midi : pétanque, volley ball, etc, etc.... comme dans un club de vacances quoi!
 
Nous avons tout les deux fait connaissance de deux belles, intelligentes, sensuelles et sympathiques "Gentilles Organisatrices", prénommées toutes deux ALINE. Au bout d'un mois et demi, j'ai quitté le club avec "mon Aline" et nous avons passé quelques jours à BORDEAUX, dans son studio.
 
Jacques lui a continué sa route avec son Aline avec qui il vit encore aujourd'hui dans le sud de la France et que j'ai été pleinement heureux de retrouver au téléphone....
Retrouvailles
Et oui, vous avez bien lu : Retrouvailles. En faisant du rangement dans plusieurs porte documents retrouvés au fond d'une armoire, je suis tombé sur un petit carnet d'adresses. Le vieux carnet retrouvé du titre.
En le feuilletant, je vois une adresse E.Mail enregistrée sous ALINE....
"Bon et ben on va tenter d'envoyer un mail à cette adresse" me suis je dit. Aussitôt dit aussitôt fait, la réponse est arrivée très rapidement.
Merci pour ce message, mais ma mémoire est déficiente. Pourriez-vous (ou tu!) me dire de qui exactement vient ce mail si aimable?
Merci de nous répondre. Jacques et Aline".
 
J'étais donc sur que c'étaient bien eux, mes amis de 1965....
Téléphone, courriel, re téléphone et nous avons retracer un parcours de vacances qui datait de 48 ans. Avec un plaisir immense, vous vous en doutez, vous amis qui comme moi avez cherché les vôtres par l'intermédiaire du Blog.
Jacques m'a raconté son parcours et surtout ma redonné en détails son année à Marrakech.
"Tu sais, Michel, j'ai même écrit un petit livre retraçant mon séjour au Maroc et il est illustré par des croquis, des dessins de là bas".
" Oh Jacques se serait bien si je pouvais en parler sur le Blog.."
 
"Et bien je vais te l'envoyer et tu en feras ce que tu veux!"
 
Quelques jours après, un colis arrivait en Allemagne avec un livre, "MARRAKECH ou la grâce terrestre" , des reproductions de ses tableaux d'alors et de la documentation...
J'ai pris le temps de tout scanner, recadrer, et en préparer l'édition que je vous fait aujourd'hui.
 
Ce n'est pas un SCHKOUN quelque chose, ni un MAN ANA, ni non plus un WER BIN ICH ? mais quelques pages qui rappellerons bien des souvenirs à vous mes amis , amoureux de Marrakech et que nous offre Jacques DEGENNE.

deg04

 

 

deg08

 

 

page01bis

page02bis

 

deg03

page03bis

page04bis

page05bis

deg01

page06bis

page07bis

page08bis

page7ter

page07terbis

deg06

page09bis

page10bis

deg02

page11bis

page12bis

deg07

Pour ceux d'entres vous qui l'aurai connu dans ces années à Marrakech, j'ai une photo de l'artiste qui était mon ami que je viens de retrouver et qui le restera.

jacques degenne


Je le remercie ici, de nous avoir fait partager, son récit et ses oeuvres.

Tout ce qui nous ramène au Marrakech de nos jeunes années est pour moi un plaisir à éditer et à vous faire partager.

Je tiens à m'excuser auprès de notre "autre ami JACQUES". J'ai interrompu le récit de son MAN ANA, mais je reviendrais la semaine prochaine pour vous offrir la suite.

Le temps semble commencer à s'améliorer et nous pouvons peut être compter sur deux trois jours de beau temps. C'est en tout cas ce que je nous souhaite.

Bonne santé à tous, votre toujours MICHEL

9 juin 2013

MAN ANA 10

Voila, nous sommes en Juin. Comme vous le savez j'écris cet article le 21 mai. donc je ne sais pas encore sous quel soleil je vais vous rencontrer... Peut être qu'entre temps j'aurais eu d'autres choses à vous dire..Inch'Allah.

La semaine qui arrive doit nous apporter la visite de ma belle famille et nous allons, mon épouse et moi, fêter un de nos nombreux anniversaires de mariage... Je devrais aussi devenir de nouveau Grand père, ou peut être le suis je déjà! Mais ça je vous en parlerais plus en détail lorsque la date sera passée....

En attendant continuons à nous divertir tout en nous instruisant avec le déroulement de la vie de Jacques et de sa famille à MARRAKECH et dans ses environs....avec un titre qui nous met l'eau à la bouche.

Jacques.... à toi la place.

 

Foie gras sous les palmiers

 

Nous avons vite abandonné le rituel du Noël en famille, au coin de la cheminée (car il y en avait une à l'appartement), pour des situations plus exotiques. Les noëls sous la tente nous évitèrent le mal au crâne le matin, les huîtres pas assez fraîches ou les dindes rôties, étouffantes à manger car trop sèches.

Comme noëls, je garde le souvenir d'un à Tan-Tan, que nous n'avons même pas célébré tant nous étions tendus à la perspective de l'aventure qui nous attendait en 1965, rallier Tarfaya. 

Je garde aussi le souvenir d'un autre Noël avec Letan, aux mines d'Igherm où il travaillait. Les mines sont en général perdues au fin fond du bled, mais les personnes qui y résident à demeure s'arrangent pour avoir un minimum de confort. Souvent autour d'une cantine, des tables en terrasse, club de boules, voire court de tennis éclairé la nuit car das certains endroits il fait bien trop chaud en été pour avoir une activité physique diurne. Nous avons visité beaucoup de ces mines perdues (Igherm, Bou Azzer, Bou Tazoult, Azgour), certaines fermées pour cause de rentabilité incertaine (Tiouit). Notre curiosité scientifique nous fit visiter nombre de gisements, rencontrer nombre de cadres, dont certains avaient leurs enfants en pensionnat à Marrakech, au Lycée Victor Hugo.

 Un souvenir particulier est associé à la venue d'amis de longue date du paternel, médecins de Bayonne que Papa avait connu dans sa période pyrénéenne et qu'il continuait de voir régulièrement. Bien qu'ayant les moyens de s'offrir des voyages prestigieux, ils aimaient bien le côté aventure de nos périples, et les rencontres insolites que nous pouvions faire à ces occasions. Ils étaient déjà venus, et, enchantés par leur première aventure, décidèrent de revenir. 

Ils vinrent accompagnés d'amis pharmaciens, et nous retrouvâmes nos amis Letan pour un voyage dans le sud. Pour la circonstance, nous avions loué une seconde Land-Rover qui ressemblait à la notre, et Letan suivait avec son increvable ID. 

Récupération des touristes à l'aéroport d'Agadir par le Paternel, puis en route vers la SATAS où nous prîmes livraison du véhicule de location. A cette époque, le 4x4 de location n'était pas vraiment entré dans les moeurs, et il nous avait fallu batailler pour louer une Land-Rover. Les pistes que nous envisagions d'emprunter ne permettaient pas d'utiliser un Combi Volkswagen, comme au voyage précédent. 

Une fois maîtrisé le freinage approximatif de l'engin (il « suffisait » de pomper un peu) nous prîmes la direction du sud. Arrêt chez le boulanger d'Ait Melloul, à la sortie d'Agadir (Agadir était encore en train de se remettre du séisme qui l'avait détruit), puis direction Bou Izakarn, et Foum el Hassane. De là, cap sur Assa puis plein sud vers le Dra et Touizgui Remz. Notre but était de profiter du dessin de la frontière qui à cet endroit là avait subi une rectification suite à la bataille de Tarfaya de 1958 : comme au bon temps du colonialisme, une nouvelle frontière avait été tracée à la règle dans le cadre d'un traité de paix. La frontière sud du Maroc n'était plus le Dra, mais, à partir de cet endroit-là, le parallèle 27°30. Tout ce terrain désertique s'offrait à notre soif d'exploration. 

Le soir de Noël, nous voici donc sur le Dra, un peu avant Touizgui Remz. Les tentes sont dressées, les voitures à côté, et les femmes nous annoncent qu'elles s'occupent de la nourriture. Elles plongent dans les volumineux bagages apportés de France, fouillent et refouillent et finalement, après un temps certain, nous signalent que c'est prêt. Nous quittons le feu autour duquel nous discutions de l'itinéraire du lendemain, et avons la surprise de découvrir, au lieu de traditionnel menu potage en sachet – boîte de conserve -  fromage – fruit, un repas du Sud-Ouest avec foie gras, confit de canard et bûche de Noël ! Pour une surprise, ce fut une surprise. Il est vraisemblable que les palmiers n'avaient jamais vu de spectacle de ce type : des convives assis sur de petits coussins en mousse autour de la nappe en toile cirée étalée sur le sable, un sapin de noël de poche dressé au milieu, et en train de déguster les productions des palmipèdes gras. Pour nous aussi, réveillonner de la sorte au milieu des tamaris et des palmiers eut une résonance particulière, nous permettant de mesurer l'écart entre nos habitudes de vie et la sophistication festive en France. Vaisselle expédiée, au lit pas trop tard. La nuit fut relativement douce. Relativement, car souvent près de l'Atlas il faisait très froid la nuit et nos duvets s'avéraient parfois limites, sauf celui de Papa qui était un duvet de haute montagne garni de plumettes d'oie. 

Le lendemain, reprise vers le Sud jusqu'au poste de contrôle de Touizgui Remz. Poste militaire, comme il en existait de nombreux dans le Sud du Maroc. Une activité de déstabilisation existait, une opposition était muselée, certains bordj dans des endroits reculés étaient des zones dont il ne fallait pas s'approcher. 

Le Sud du Maroc côtoyait l'Algérie, et des conflits avaient déjà eu lieu entre ces deux nations. Le Sud-Ouest jouxtait le « Rio de Oro », le Sahara espagnol, sur lequel la dynastie Alaouite avait des prétentions historiques. A la limite de l'Algérie et du Sahara Espagnol, cette région était étroitement surveillée. 

Une fois la qualité des voyageurs vérifiée (un professeur, un ingénieur, un docteur, un pharmacien, cela faisait quand même sérieux et pas trop agent secret), un laissez-passer nous fut délivré jusqu'au poste suivant de Mseied. 

On peut s'étonner de telles tracasseries administratives, mais il faut bien réaliser qu'il y avait environ deux cents kilomètres de désert sans âme qui vive ou presque entre ces deux localités, et que les autorités ne souhaitaient pas devoir intervenir pour nous prêter assistance. Pas de panneaux indicateurs, pas de téléphone, une boussole pour se guider... Pas question d'être dépendants malgré cette situation délicate. Cela a d'ailleurs toujours été notre attitude, héritée de longues années de pyrénéisme : ne jamais dépendre des autres pour se sortir d'une situation difficile. 

L'autonomie en eau et essence ayant été jugée suffisante, nos trois véhicules franchirent la barrière faite d'un tuyau métallique reposant sur quelques pierres, et nous nous engageâmes sur la piste, en ayant comme consigne de tourner à droite vers Mseied dans quatre ou six kilomètres et non de continuer tout droit vers Zag, poste complètement perdu, le dernier avant l'Algérie ou le Rio de Oro suivant que l'on appuyait un peu à gauche ou à droite après. 

Sur l'itinéraire suivi, nous continuâmes nos recherches pré, pro et historiques. Nous longions le Dra côté sud, sur sa rive gauche. Un plateau calcaire entaillé laissait apercevoir un vaste lit argilo-sableux, sans trace d'eau. Il devait toutefois y en avoir en dessous, puisque nous identifions çà et là des tamaris ou des palmiers.

Au débouché sur un des bords de cette élévation qui ne devait pas excéder deux mètres, nous découvrîmes sous nos pieds une « zriba ». 

La Zriba, c'est un enclos défendu en général par des épineux (le jujubier le plus souvent, dont les épines sont redoutables), qui contient des bêtes ou les empêche au contraire d'accéder quelque part. 

Cet endroit étant relativement ombragé par une plaque rocheuse, nous pensions que des animaux y avaient été parqués lors de fortes chaleurs par quelques nomades R'guibat dont la tente (la raïma) aurait été implantée à proximité. En nous approchant, nous découvrîmes le corps momifié par la sécheresse d'une femme dans ses habits caractéristiques. Nous prîmes alors conscience de l'âpreté de ce désert, où à quelques mètres de la route quelqu'un était mort, de soif vraisemblablement. Il n'avait pas été jugé utile de l'ensevelir, on ne sait pourquoi. Bergère gardant un troupeau qui « paissait » dans le lit du Dra ? Voyageuse égarée assommée par le soleil un jour d'été ? La mort dans le désert est une des manifestations de la vie que l'on y rencontre. 

Notre ami médecin, lui-même habitué, fut saisi par la violence de ce spectacle. 

Nous reprîmes notre route vers Mseied où le contrôle de sortie de la zone dangereuse fut rondement mené. 

Nous étions à côté de Tan Tan en début de soirée, et nous bivouaquâmes non loin de la ville, près de tentes de nomades qui respectèrent notre campement de façon royale. 

Le lendemain, nous fîmes nos emplettes à Tan-Tan ; essentiellement une paire de Talkie-Walkie japonais dotés d'une portée conséquente, dont la possession était bien entendu interdite au Maroc du fait de suspicions permanentes de complot. Mais cela nous semblait un élément de sécurité supplémentaire qui pourrait se révéler appréciable en cas de difficulté dans les régions de plus en plus sauvages dans lesquelles nous nous aventurions. 

Le retour se fit vers Marrakech, puis de Marrakech nous repartîmes avec la jeep de location jusqu'à l'aérodrome de Casablanca-Nouacer, où tout le groupe reprit l'avion sur Bordeaux. Le décalage entre le véhicule couvert de poussière, les valises et sacs que nous en extirpions et le défilé de voitures sophistiquées d'où sortaient des personnes élégamment vêtues fut assez saisissant. L'avion était encore un moyen de transport pour privilégiés, à l'époque.

 Voici encore un récit digne des meilleurs aventuriers. Je regrette d'avoir quitté trop tôt le Maroc et de n'avoir pu, comme Jacques et ses parents, vivre ce genre d'aventures. Il faut dire que mon père faisant régulièrement ces voyages dans le sud pour son travail (Vous vous souvenez de cette photo de lui et de sa voiture sur une de ces pistes du désert marocain) n'avait pas le réflexe de nous les faire partager. Le plus loin où il m'a emmener avec lui et Ourzazate et Zagora....Donc remercions encore Notre ami JACQUES pour son sens du récit, précis, documenté et souvent drôle....

Que le soleil soit avec vous... Votre toujours MICHEL

Publicité
2 juin 2013

MAN ANA 9

Chers Blogueurs et amis, voici le deuxième essai d'article préprogrammé. Bien sûr, cela ne doit pas vous empécher de continuer à laisser des commentaires et surtout à m'envoyer "du grain à moudre". Car vous le savez, je tiens un blog sur nos jeunes années marrakchies depuis déjà très longtemsp et je vous ai raconté en large, en long et même en travers, tout ce que je pouvais vous avouer (Il reste toujours un "coté sombre" que je garderais pour moi...Cela risquerait de TROP vous intéresser)...

C'est donc à JACQUES que je laisse la place avec un nouveau chapitre de son MAN ANA....

 

La nouvelle Land-Rover

 

L'appel du sud était fort. Papa rendait souvent visite à ses amis Landau, dorénavant à Agadir. C'est grâce à eux qu'il avait été amené à venir au Maroc. Après un détour par le Liban, ils avaient finir par revenir au Maroc. André (on a toujours dit Dédé) était un grand chasseur, amateur de virées dans le sud aussi. Il avait acheté à la SATAS (Société Anonyme des Transports du Souss) une Land-Rover 109, châssis long, avec de surcroît un moteur 6 cylindres qui donnait une bonne agilité à ce véhicule pourtant imposant, bien que ne mesurant que 4,45 m. Mais ses formes carrées alliées à une largeur de 1,70 m lui donnaient une habitabilité conséquente. 

Dédé avait immédiatement fait entrer le véhicule au lycée technique d'Agadir, et il l'avait confié aux mains expertes des mécaniciens de la section auto. Une des ses modifications, et non des moindres, fut de remplacer la banquette avant par une paire de sièges extraits d'une R 16 TS (le modèle de luxe que l'on pouvait avoir au Maroc) en similicuir. Un petit râtelier pour les armes de chasse, un second réservoir d'essence, un aménagement pour dormir, et il était prêt à partir en raid à tout bout de champ. 

Papa voulut la même, et quelque temps plus tard, la SATAS vendit une deuxième Land-Rover de ce type, aménagée pour le transport des touristes : 8 places pour des passagers à l'arrière, toit rehaussé semi métallique, dont les côtés en toile se relevaient pour laisser la vue vers le paysage et accessoirement permettre aux touristes de goûter la poussière, et énorme galerie pour charger bagages et provisions. Le nombre de passagers était le principal critère pour une entreprise de transport de voyageurs.

Les autres modifications étaient la taille des pneumatiques, énormes et de type « poids lourds », et l'adjonction d'antibrouillards (ridicules) et de supports de jerrycans à l'avant, sur le pare-chocs.

La roue de secours, d'un poids confortable, quittait l'habitacle pour venir sur le capot, ce qui rendait la conduite sur petit chemin montagneux délicate du fait du manque de visibilité. Mais quel gain de place à l'arrière, nous qui avions souffert d'être entassés dans la land châssis court, assis en vis-à-vis  sur des coussins jetés sur le banc en aluminium de la caisse, et rangeant nos jambes entre les paniers du pique nique que nous laissions en surface en prévision du midi ! Là, nous trouvâmes de confortables sièges rembourrés avec accoudoirs, même s'ils étaient toujours en position latérale par rapport à la marche du véhicule. 

Nous effectuâmes le voyage inaugural de cette nouvelle voiture avec Lescure, un collègue enseignant de français, un collègue professeur marocain et Simoneau, professeur d'histoire géographie qui était un éminent préhistorien et passait ses loisirs à arpenter le bled à la recherche de sites rupestres. Il en découvrit une belle quantité, et son nom est largement associé à la préhistoire marocaine.

 Ce voyage-ci, nous avions le côté culturel, et le côté humaniste car Lescure qui parlait et écrivait l'arabe couramment, était féru d'histoire et de civilisation marocaine. 

Nous partîmes d'Agadir, où nous prîmes livraison de la Land-Rover, puis roulâmes  vers les sites rupestres d'Akka et de Tata. 

La prospection se faisait de façon approximative, mais la cartographie au 1/25000 n'était pas disponible au Maroc, les vues aériennes classées « secret militaire ». Nous avions de vieilles cartes au 1/100 000 héritées d'un cabinet d'architectes du bâtiment et des travaux publics qui avait amassé toute la couverture du sud marocain en cartes réalisées lors du protectorat. Cartes qui nous faisaient rêver par des zones blanches marquées « zone non cartographiée ». Les cartes se faisant le plus souvent à partir du terrain et non par imagerie aérienne stéréoscopique et photo interprétation, ces zones illustraient le travail des cartographes, militaires le plus souvent, qui avaient arpenté le pays pour donner une image fidèle de son relief. 

Nous repérions une crête rocheuse avec des faces à peu près plates, nous arrêtions le véhicule et nous parcourions alors les rochers à la recherche du quelque trace d'artefact. Nous avons ainsi trouvé quelques gravures, rapidement photographiées et reportées sur une carte et un petit carnet. Avec eux, nous apprîmes à identifier des meules dormantes et autres polissoirs, abandonnés par des habitants du néolithique voici quelques milliers d'années et restés en plan sur le sol. Nous avons ramené quelques polissoirs et meules, mais nous avons toujours laissé les gravures sur place, conscients du fait que tôt ou tard, il se trouverait des gens pour les revendre à des amateurs collectionneurs d'antiquités.

 Cela s'appelle du pillage, et cela caractérise aussi, hélas, la plupart des sites archéologiques. 

Nous tenions cependant à essayer de garder au moins une image  de ces chefs-d'oeuvre, et nous relevions consciencieusement sur les pierres les gravures d'animaux de la savane très stylisés, d'inspiration saharienne et au trait fin, et des gravures plus récentes, au trait ou piquetées suivant la nature de la roche, d'animaux et d'hommes associés à des chars. Les chars des Garamantes, ces ancêtres des touareg, qui régnaient sur le désert avant le christianisme, et avec qui commerçaient les romains, quand le Sahara était fertile. C'était il y a bien longtemps. 

Lescure nous initia à la pratique du chèche. Le chèche, c'est cette longue bande de tissu qui est entortillée autour de la tête pour se protéger du soleil. En fait, c'est un peu plus compliqué que cela. D'abord parce qu'un chèche, c'est aussi une coiffure sociale. Si un descendant d'esclaves a un tout petit chèche (mettons 2 mètres), les grands chefs ont le privilège de porter un chèche dont la longueur peut atteindre huit mètres. Il permet alors un drapé sophistiqué, conférant à celui qui le porte une allure de noblesse. 

L'utilité du chèche est multiple. Il protège du soleil, c'est évident, en ce qui concerne le rayonnement direct. Car contrairement à ce que nous faisons au moindre rayon de soleil dans nos pays tempérés, il ne faut surtout pas trop se découvrir dans un pays très chaud et sec comme le Sahara. Sans exagérer, des vêtements amples et légers (gandoura en cotonnade, sarouel – très à la mode en ce moment) protègent de la chaleur excessive et limitent les pertes hydriques (transpiration). Porter sa boisson est toujours un problème du fait que l'eau pèse, et qu'elle est indispensable. Pour l'économiser, mieux vaut donc éviter de la consommer. En résumé, celui qui est torse nu, en short et tongs avec sa bouteille d'eau à la main, c'est le touriste. Le local est de préférence bien habillé et à l'ombre du palmier. Il attendra le soir pour boire un thé à la menthe. On le taxera de paresseux, mais en terme de développement durable, c'est lui qui est dans le vrai.

Le chèche sert aussi à protéger les lèvres de la sécheresse ambiante. Il suffit de le remonter sur le nez. On peut ainsi se passer de baume à lèvres. En en recouvrant les yeux, comme il s'agit d'un coton aéré de couleur sombre, on invente les lunettes de soleil. En cas de vent de sable, enfin, il évite d'avoir la peau du visage passée au papier de verre et le yeux et la bouche pleins de sable.

 Voilà pour la partie « été ». En cas de fraîcheur, il joue le rôle de bonnet. Enfin, dans un pays où l'eau est parfois difficile d'accès, il permet de filtrer les plus grosses particules de ce que l'on va boire. Utile s'il s'agit d'un fond d'oued boueux. 

Autant dire que nous fûmes conquis par la polyvalence du chèche, et qu'au premier souk venu, je me ravitaillai en cotonnade noire ad hoc, que je conservai plusieurs années. 

Nous marchâmes beaucoup ces vacances là, Simoneau étant un grand coureur de désert. Chapeau, veste de treillis, pantalon, chaussures de marche, appareil photo et gourde dans un petit sac, il partait suivre les crêtes que l'on voyait non loin de nous, et pouvait rester absent des heures. Sa jeep était son point de repère, et il y eut quelques fois, nous dit il, où il s'était fait quelques frayeurs n'arrivant pas à retrouver le véhicule qui contenait sa provision d'eau qui commençait à lui manquer sérieusement. A l'époque, ni GPS ni téléphone portable. 

Il ne fallait compter que sur soi-même, et sur l'hospitalité de quelques nomades que l'on pouvait parfois rencontrer. On avait l'impression qu'ils étaient dénués de tout, et portant ils nous invitaient à venir partager un thé sous leur tente, dans la plus pure tradition de l'hospitalité nomade. 

Il nous est arrivé de rendre la pareille à quelques voyageurs qui arrivaient le soir près de notre campement : ils allaient à pieds au souk vendre un chameau ou acheter quelque chose, se trouvaient à 40 km de leur destination et n'avaient que très peu d'eau et pas de nourriture. Nous leur offrions de l'eau, de quoi manger : kesra, boîte de sardines et orange. Ils passaient la nuit derrière la dune d'à côté, et au matin repartaient en nous faisant un geste large d'amitié et de remerciement. Les relations, c'est aussi simple que cela dans le désert. 

Tout le sud du pays, entre Zagora et Foum el Oued Dra, est parcouru par le l'oued Dra. Ce fleuve vient de l'Atlas, descend vers Zagora et ensuite chemine en plein désert où il disparaît complètement. 

Paradoxalement, à son embouchure, il  un débit quasi permanent bien qu'irrégulier. Ce qui se produisait à l'époque, avant la construction du barrage sur le Dra au niveau de Ouarzazate, était une inondation périodique, qui faisait apparaître en certains endroits des nappes d'eau, comme le lac Iriki entre Foum Zguid et Zagora. 

Le lit du fleuve était marqué par quelques tamaris qui profitaient de l'humidité en sous-sol. Ce lit, entre Djebel Bani au Nord et Djebel Ouarkziz au Sud, marquait la frontière floue entre le Maroc et l'Algérie. Les relations entre Algérie et Maroc étaient assez tendues à l'époque, aussi nous évitions prudemment de trop nous approcher de cette zone frontière. 

Toujours à la recherche de gravures, nous nous aventurâmes dans le lit du Dra et eûmes la surprise d'y trouver des traces d'agriculture. Les gens du coin profitaient des crues pour semer et récolter seigle, orge, avoine, blé, variétés rustiques qui réussissaient à produire quelques céréales qu'il fallait se hâter de moissonner. Nous nous rendîmes compte ainsi que ces zones n'avaient de désertique que la végétation, car elles étaient très fréquentées à cette saison. 

Un habitant du coin eut la frayeur de sa vie, car à sa rencontre Lescure commença à lui parler en arabe très littéral, que comprenait moins bien son collègue plutôt accoutumé à l'arabe urbain dialectal. Pendant qu'ils discutaient, Papa, trouvant sa tête sympathique, entreprit de le filmer avec son énorme caméra semi professionnelle. Nous vîmes qu'il devenait fort inquiet, agité et mal à l'aise, et comprîmes qu'il confondait la caméra avec son gros téléobjectif avec une arme quelconque et se demandait s'il n'allait pas rejoindre le paradis d'Allah très vite. Le malentendu dissipé, il fut des plus aimables avec nous. La télévision n'arrivait pas encore là-bas à l'époque, et les sources d'information étaient forcément limitées. Mais la caméra ne ressemblait vraiment pas à une arme. 

De retour de ces vacances, c'était clair : la Land-Rover châssis long avait plutôt un comportement de camion : reprises lentes, lourdeur, côtes à gravir en seconde... La différence de poids en plus pour un même moteur se faisait sentir. Mais nous apprécierions à l'avenir son habitabilité record et la facilité à emporter un équipement volumineux dans des conditions de confort appréciables.

 Je vous souhaite une bonne nouvelle semaine avec, si possible, une nette amélioration du temps et un peu plus de soleil...Votre toujours MICHEL

 

26 mai 2013

MAN ANA8

Chers amis lecteurs, bonjour. Pour combattre mes absences, je vais préparer plusieurs chapitres du récit de notre ami JACQUES et, grâce à CANALBLOG je vais les programmer pour qu'ils paraissent plus régulièrement qu' à présent....

Lorsque j'aurais de nouvelles photos à vous montrer ou des informations à partager avec vous, j'insérerais de nouveaux articles. Ainsi vous ne serez plus trop longtemps sans lecture...

Voici donc le premier de ces articles préprogrammés

 

Pâques : Henri et la savonnette

 

Maman nous avait quittés. Je revins en France poursuivre mes études et Papa et mon frère Michel restèrent seuls dans l'appartement du la rue Lamure. La solidarité des amis marrakchis fut réelle, celle des amis de France aussi.

 C'est ainsi que Henri et sa femme Geneviève, amis de longue date des parents,  nous rendirent visite pour pâques,et que Papa concocta un petit tour dans le sud, avec camping sous la tente. Nous serions accompagnés par nos amis Raballand, à quatre dans leur increvable 4L. 

Cette équipée passa par le Djebel Sarho, avant de rejoindre Alnif puis Zagora par une piste épouvantable, au travers des contreforts de l'Atlas. 

C'était le rythme habituel de ces balades, véritables méharées mécaniques, quelques kilomètres en voiture puis arrêt pour photographier un site, une activité, discuter avec des gens au bord de la piste. Le convoi de deux véhicules marquait sa progression par un double nuage de poussière, et cette année là le temps fut relativement clément pour pâques : pas trop chaud, un beau ciel bleu. 

Le camping du soir se faisait dans un coin dégagé, loin des habitations, parfois à côté de tentes de nomades qui nous rendaient visite mais respectaient parfaitement notre intimité, dans la mesure où nous avions adopté un mode de vie voisin du leur encore que bien plus moderne. Il ne nous fallait que quinze minutes pour monter ou démonter la tente, et en trente minutes le camp était dressé ou levé. 

Le matin, c'était le réveil, il faisait assez frais donc on sautait dans pantalon et pull, on enfilait le blouson, puis avec les premiers rayons de soleil on commençait à de découvrir. Le petit déjeuner était constitué de pain-beurre avec café au lait. Entendez par là tranche de kesra dont nous faisions régulièrement emplette sur les souks, beurre conservé tant bien que mal dans une boîte étanche (au matin, il était de nouveau solide) et confiture le plus souvent d'abricots Aïcha, petit pot refermé avec un sac plastique maintenu par un élastique.

Outre que le verre était plus lourd, il était très fragile et dans une véhicule tout-terrains aussi bien suspendu qu'une Land-Rover, conserver du verre intact s'avérait hasardeux. Le café était soluble et le lait était du lait concentré non sucré en boîte « la petite hollandaise », marque que nous trouvions à l'époque au Maroc. Une boîte par petit déjeuner. Il ne s'agissait pas tant de gagner du poids que de conserver les aliments sans réfrigérateur . Nous trouvions assez facilement de l'eau, aussi un jerrycan de 20 litres suffisait-il. Nous avions par contre un jerrycan de 10 litres de vin rempli chez le caviste du coin (on ne concevait pas le voyage sans vin à l'époque). 

Ensuite, la nourriture était un mélange de fruits et légumes (tomates, oranges) et de boîtes de conserves. Souvent thon, sardines, maquereaux et pâté le midi. Plus rarement pâté toutefois, car c'était une denrée de luxe, souvent importée, le Maroc, pays musulman, ne produisant et ne consommant que peu de porc. 

Le soir, c'était un potage en sachet, suivi d'une boîte de conserves (cassoulet, ravioli, choucroute) et d'un fruit. 

J'oubliais le fromage ! Vache qui rit ou boule de fromage hollandais. En tout début de voyage, c'était la course avec le camembert : il s'agissait de le finir avent que son odeur ne devienne insoutenable. 

Cela peut paraître invraisemblable de vivre dans cette absence de confort, amis cela faisait partie du charme de ces balades, et à l'époque où l'on croule sous les restaurations rapides ou lentes sous toutes leurs formes, animées par des ambiances musicales ou sonores continues, à la porte de supermarchés regorgeant de victuailles, on imagine mal le bonheur de savourer son sandwich thon à la sévillane – kesra assis sur une pierre en plein désert, au milieu de rien, environné du silence. 

Ce qui ne nous empêchait pas de temps en temps de descendre dans un caouaggi, ces cafés qui proposent des tajines cuisinés le long des routes ou dans les villages, et de savourer un repas traditionnel marocain. Il y en avait d'excellents, d'autres plus particuliers et notre père nous raconta le repas qu'il avait fait lors d'une de ses virées à Tazarine, quelques légumes autour d'une rotule de chameau, une viande tellement dure que ni lui ni ses compagnons n'avaient pas été capables de la détacher des os.

De cette époque, j'ai toujours gardé le goût du bruit de la nature. Même en plein désert, écouter le silence, en fait le bruit du vent, le bruissement des ailes d'un oiseau si l'on était près d'une guelta, ces mares plus ou moins temporaires, est un bonheur. On rencontre de nos jours de gens bardés d'écouteurs auriculaires reliés à un téléphone portable aux multiples fonctionnalités sonores, mais je me pose souvent la question : ces gens-là sont-ils capables encore d'écouter la nature ? « Je m'ennuie si je n'ai pas de musique », me répondent les sportifs qui font leur footing d'entrainement. C'est peut-être dommage, de se passer ainsi de son imagination... 

C'était tout ce dépaysement, que nous proposions à Henri et Geneviève cette année là. Ils disposaient de situations enviées, mais le fait de quitter Paris et de se plonger au coeur de ce présahara marocain leur fut une véritable aventure. 

Bientôt, fleuriraient les catalogues touristiques d'agences spécialisées dans les voyages d'exploration. De nos jours, vous avez le choix, de la traversée du Hoggar en dromadaire (avec visite des sites de gravures rupestres et repas sous la tente targuie) à la balade en Antarctique. L'aventure avec Europe Assistance, ce n'est plus l'aventure, et on l'oublie très vite. Jusqu'à ce qu'un volcan vous rappelle que traverser la moitié du monde pour passer une semaine dans un hôtel en bord de mer c'est aussi une performance.

 Dans ce genre de virée, l'autonomie était primordiale. Et avec elle, se posait le problème de la consommation de l'eau. Pas question de la gaspiller, en particulier parce qu'il était difficile d'en faire suivre de grandes quantités dans une Land-Rover châssis court, d'autant qu'un litre d'eau pèse un kilo. Il fallait boire, faire la vaisselle et se laver avec le minimum. J'arrivais à consommer pour la toilette un demi verre d'eau par jour (pour se brosser les dents). C'était succinct, mais le grand air permettait de ne pas trop souffrir du voisinage des uns et des autres, et le retour à la civilisation était suivi de longues tractations pour savoir qui occuperait la salle de bains le premier. 

Nous consentions cependant de grands sacrifices pour que ces dames puissent rester élégantes, et leur consommation d'eau était nettement supérieure. 

Lors de ce voyage, Geneviève prit l'habitude de s'éclipser le matin vers un groupe de palmier ou de rochers susceptible de lui laisser un peu d'intimité. Mais la vérité m'oblige à relater que plusieurs fois elle demanda à son mari de lui apporter la savonnette qu'elle avait oublié à la tente. « Passe moi la savonnette », criait-elle. Et le passage de la savonnette durait... une bonne demi heure !

 

20 mai 2013

Les photos de Blandine et MAN ANA 7

Bonjour les amis du Blog. Est ce le manque de soleil qui m'a fait déserter le Blog ?... Peut être, mais pas sûr. Est ce le ciel gris et humide sous lequel nous vivons depuis quelques mois déjà qui m'a fait oublier la chaude lumière de Marrakech? Encore pas certain. Est ce plutôt une flegme persistante et des tas de travaux d'intérieur qui m'ont détourné de la rédaction d'un article sur le blog...Je ne serais pas franc en l'affirmant. Mais le principal n'est il pas que je sois là maintenant pour vous conter quelques lignes....

Tout d'abord..

Notre amie BLANDINE m'avait promis des photos de son séjour dans la belle ville rouge.. Elle a tenu parole et ça depuis déjà quelques semaines. Elle m'en avait même fait la remarque sur FB. Blandine je t'embrasse pour me faire pardonner..

Voici le cour résumé qui accompagne les photos..

Nous sommes partis en famille pour ce deuxième voyage au Maroc, qui nous a vu aller à Taroudant et Marrakech, en passant par Agadir et Essaouira;.

Toujours à la recherche des mes racines et en allant à la découverte aussi de nouveautés.
 

PICT0174


Nouveauté: à Marrakech, l'immeuble en construction qui remplacera le petit marché d'origine.

 
PICT0142
perennité de l'église des st Martyrs.
PICT0206
 
Redécouverte, enfin de l'intérieur du Lycée Victor HUGO où je n'avais pas pu entrer,il y a trois ans.
 
PICT0267
 
Puis passage devant l'entrée de la Mamounia.

 
 

Merci BLANDINE pour ces photos qui seront comme une piqure de rappel administrée à tous ceux qui n'y sont pas allé depuis longtemps.
 
J'ai aussi reçu un message par l'intermédiaire du "Contacter l'auteur" d'un ancien qui lui aussi aimerait retrouver des amis et discuter un peu de Marrakech. Voici son message:
 
 Je suis un ancien de marrakech et voudrais retrouver mon passé.

Bonjour
Je m'appelle Michel Guyon, je suis né en 1951 et j'ai passé mon enfance à Marrakech de 1953 à 1962
Mon père travaillait au moyens généraux. Il est resté de 1952 à 1963 à Marrakech
J'étais à l'école primaire à la BA 707. J'ai un frère Jean qui est né en 49 et une soeur Anne-Marie qui est né en 1946. Nous étions tous les trois à Marrakech et nous habitions au bloc lomat à l'extérieur de la base
Je souhaiterais partager des souvenirs.
Cordialement. Michel
 

Bien sûr si l'une ou l'un d'entre vous se souvient de Michel et de ses frère et soeur, je serais heureux de vous mettre en contact avec lui....Alors à vos claviers après avoir ravivé vos mémoires....Pour moi, bien que sa soeur ANNE-MARIE soit de la même année que moi, j'avoue que je n'ai, comme ça, pas de souvenir particulier. Il faudrait sûrement que je vois une photo d'époque... Alors Michel si tu possèdes ce genre de documents dans une boite à chaussures, n'hésites pas, fais les moi parvenir....

En ce moment, d'autres amis y sont, à Marrakech, au soleil et au chaud.

Je leur souhaite un bon séjour et attends avec impatience (Ils ne vont pas être content) leur retour avec, je le souhaite, de nouvelles photos....Pourvu qu'elle n'ai pas oublié le chargeur de son appareil photo..

Mais maintenant je cède la place à Jacques qui continue à nous ravir avec le récit qu'il nous offre.. Ouille, j'allais écrire "Chaque semaine"..Il faudrait que je me domestique un peu pour assurer une continuité à ses écrits.. Merci JACQUES de ta patience....

Conserves d'abricot

abricot

 

Lorsque nous habitions Avenue Hassan II et qu'approchait l'été, nous fûmes étonnés de voir tous les soirs des groupes compacts de femmes en djellaba qui défilaient sur les larges trottoirs plantés de mûriers.

L'avenue faisait la liaison entre la Médina et la gare. 

Or c'est en face de la gare que se trouvait le « quartier industriel », et les quelques usines et conserveries qui à l'époque constituaient l'essentiel des activités de production de la ville. 

Ces femmes étaient les ouvrières des conserveries, notamment la conserverie Cartier qui produisait les confitures et fruits au sirop « Ouka », célèbres à Marrakech. 

Encore que nous préférions la marque « Aïcha », que l'on retrouve de temps en temps dans nos supermarchés français, mais qui était produite à Meknès. Toute une adolescence à la confiture d'abricots « Aïcha », cela marque. 

Grâce à des contacts avec la famille Cartier, nous fûmes invités un soir de pleine saison de production abricotière, à venir visiter l'usine.

 Ce devait être ma première visite du monde industriel, et je devais avoir 14 ans à l'époque. 

Il faisait passablement chaud, aussi la visite se fit-elle dans la soirée, à la fraîche. Sous la conduite du chef de production, nous entrâmes dans un immense hangar où se trouvaient les chaînes de conditionnement.

Notre entrée fut saluée par un chant de bienvenue entonné par toutes la centaine femmes qui travaillaient sur la chaîne. La fabrication était très largement manuelle du fait du coût de la main-d'oeuvre au Maroc, aussi pûmes nous observer la totalité des étapes. 

D'un côté, arrivaient les abricots, déchargés par camions entiers. De l'autre les boîtes en fer blanc.

Les abricots étaient tout d'abord lavés et traités pour être débarrassés des produits chimiques de culture. Ils étaient ensuite calibrés, les moins conformes prenant la direction de la chaîne de confiture, les plus présentables celle de la chaîne de fruits au sirop. 

Puis ils arrivaient sur une table vibrante où les ouvrières les prenaient,  séparaient sur des couteaux fixes les deux oreillons et extrayaient le noyau. Leur vitesse et la précision de leurs gestes étaient la première étape de la qualité de la production. Quelques fruits gâtées étaient évacués à ce stade, et les oreillons reprenaient le tapis roulant pour la phase suivante. 

Les oreillons étaient ensuite savamment rangés dans la boîte, et il fallait avoir le coup d'oeil car la boîte devant faire 1kg, il fallait bien doser. Ensuite, un minimum de dextérité était nécessaire pour éviter les bords coupants de la boîte. 

Ce premier rangement était complété par quelques oreillons supplémentaires ajoutés par le contrôleur en fin de chaîne pour arriver au poids annoncé.

Puis, le sirop ajouté, le couvercle était serti et la boîte passée à la vapeur pour la cuisson. Cuisson légère pour les abricots au sirop, plus longue pour la confiture. Moi qui pensais que la confiture se faisait en chaudrons, je fus surpris de voir que fort logiquement cela se passait dans la boîte directement. 

Une fois cuites, les boîtes descendaient avec un grand vacarme, accompagnées de jets de vapeur, dans une glissière inclinée avant de passer au lavage puis à l'étiquetage. 

Ce poste était assez pénible du fait de la chaleur et du bruit, et le passage entre des deux lignes de cuisson m'avait particulièrement impressionné. L'enfer de Dante, m'étais-je dit alors que je passais rapidement sur l'escalier métallique, entouré de boîtes qui dévalaient le plan incliné. 

Enfin, les boîtes étiquetées étaient rangées en cartons, plus faciles à manipuler pour les expéditions.

La visite se termina par l'aire de stockage des noyaux, impressionnante. On nous expliqua que les noyaux seraient brûlés dans la chaudière qui produisait la vapeur nécessaire à l'étuvage et à la stérilisation. 

Les enfants que nous étions furent rêveurs devant le nombre de noyaux, quand on sait l'intérêt que revêtaient les noyaux pour les petits marrakchis à la saison des abricots : « A qui tire, dix noyaux » était le cri qui émaillait la cour de récréation de l'école du Guéliz quand nous arrivâmes. 

Nous avions bien des préoccupations d'enfants à l'époque.

 

La Targa

 

Nous étions des citadins, et habitions dans un immeuble, non loin du Lycée Victor Hugo. Notre immeuble donnait de façon un peu lâche sur la route de La Targa, où nous nous déplacerions pour diverses activités. 

Outre une visite des vergers de Soueilah, organisée par la Société des sciences naturelles de Marrakech et qui nous fit découvrir les différentes variétés d'agrumes, nous y eûmes des activités hippiques. 

Je ne sais plus comment cela commença, mais l'envie vint à nos parents de nous faire faire une activité sportive, et ils virent en l'équitation quelque chose de tout à fait intéressant. Il est vrai que les conditions tarifaires des clubs hippiques au Maroc n'avaient rien à voir avec celles de France. 

Sans doute par une relation de collègues à ma mère, nous pratiquâmes un certain temps sous la direction de M. Sabathier, ancien officier de cavalerie, qui adorait les chevaux, les femmes et sa Chevrolet « Impala » de 1959, celle dont l'arrière comportait de larges ailes horizontales. Il lui arrivait aussi, plus modestement, d'utiliser une 4CV Renault. 

Dans un bled de la Targa, géré par un couple d'origine Italienne, il avait organisé un petit club. Quelques boxes, deux carrières régulièrement labourées pour que les chevaux puissent évoluer sur un sol suffisamment souple, quelques obstacles pour l'apprentissage du saut, et d'immenses terrains de promenade dans cette Targa agricole. 

Nous commençâmes bien sûr par l'initiation, le travail en longe puis après quelque temps par le travail en reprise. Par groupes de cavaliers de force sensiblement égale, nous tournions dans la carrière et apprenions voltes, demi voltes, doublage, individuel ou successif. Le but était de nous faire acquérir un minimum de maîtrise dans la conduite du cheval. 

Puis, progressivement, il nous initia à la promenade, à la montée et descente de raidillons et au slalom entre orangers. 

Il pleuvait rarement, il faisait plus souvent chaud et nous rentrions fréquemment assoiffés après une heure passée en plein soleil. L'été, quand il faisait encore plus chaud, on montait le soir après six heures. On faisait aussi des promenades avec pique nique le dimanche, encore qu'il ne me souvienne pas d'y avoir participé. 

Traditionnellement, après le retour aux boxes, il y avait dégustation de boissons autour du local « administratif » qui comportait une table et un gros réfrigérateur plein de Judor, Ricqlès et autres bières Stork ou Pils. Les bières, c'était pour les grands, les boissons non alcoolisées pour les petits que nous étions.

Le bled était à 7 km de la maison. Au début, consciencieusement, les parents nous y accompagnaient à tour de rôle. 

Avec l'âge, vint la lassitude des parents et notre besoin d'indépendance. Nous commençâmes à nous rendre au club à vélo. Entre 14 km de vélo sur mon Liberia bleu ciel et une heure d'équitation, je rentrais complètement harassé, et je n'étais pas le seul. La sieste d'après-midi s'avérait alors indispensable. 

Pour moi, l'aventure s'arrêta au retour d'un été en France. Dès notre arrivée à Marrakech et le retour de températures plus clémentes, les parents insistèrent pour que nous retournions à La Targa faire du cheval.

Un peu à contre coeur, angoissé, je repris le chemin du Club. 

Gérant l'oisiveté des chevaux en ce début d'automne, M. Sabathier m'attribua un pur-sang du nom de Cherbourg, un peu caractériel il faut bien le dire. Le cheval, pas M. Sabathier. Nous partîmes en promenade, mon frère, M. Sabatier et moi, pour reprendre contact avec le cheval. Pour retrouver l'assiette, nous déchaussâmes les étriers. 

A un moment donné, Cherbourg décida de partir de son propre chef. Ainsi que l'on chercha à me l'expliquer plus tard, une fois de plus, il fallait le tenir mais ne pas lui tirer sur le mors. Bref ce fut ma faute si l'abruti de canasson (il n'y a pas d'autre mot) décida de « m'embarquer ». Cela n'aurait pas dû poser de problème, même sans étriers au galop, bien assis, sauf que le terrain de course était traversé par un fossé d'irrigation que le cheval ne pouvait franchir au galop qu'en sautant

Voyant arriver l'obstacle, je me livrai à une rapide mais indispensable révision mentale de la technique du saut, apprise quatre mois plus tôt, sur des obstacles calibrés. Bon, en arrière, les rênes, pas le temps de s'accrocher et de toute façons c'est déjà trop tard et voilà Cherbourq qui saute au dessus de l'obstacle.

Je retombe un peu déséquilibré, et sans étriers c'est la chute douce mais inéluctable sur le côté.

Un grand choc, un nuage de poussière, de la terre plein les dents et les binocles trois mètres plus loin, comme d'habitude quand je me cassais la figure. 

Le temps de les remettre, je vois M. Sabathier sur Tuc, son cheval, piquer des deux à la poursuite de Cherbourg, tout en criant à mon frère de rester là. Je me relève tant bien que mal, mais le pied a sérieusement trinqué, car je ne peux en poser que le talon. Je boitille jusqu'à nom frère, et remonte sur son cheval car je suis incapable de rentrer au club en marchant. M. Sabathier revient en ayant rattrapé Cherbourg, m'explique qu'il fallait le tenir, etc. et me félicite d'être remonté immédiatement. En fait, je le déçois un peu quand je lui explique que ce n'est pas par conviction mais par nécessité. 

De retour au Club, M. Sabathier laisse mon vélo sur place et me ramène en voiture alors que mon frère rentre sur son vélo rouge. Le serrement de coeur de Maman quand elle rencontra dans l'escalier M. Sabathier qui redescendait de l'appartement ! 

Le lendemain matin, je ne pouvais plus poser le pied par terre. J'eus droit à une visite chez le Docteur, puis à une radio qui décela un « décollement épiphysaire », à savoir une tête d'os du pied (l'épiphyse) qui avait commencé à se séparer de la partie longiligne de l'os, la diaphyse. 

Pas de béquilles, une semaine sans école, et utilisation d'une chaise pour poser le genou et me déplacer dans l'appartement. 

En revenant au Lycée, je fus le héros du jour,affecté toutefois d'une légère claudication. 

Mes prétentions de cavalier s'arrêtèrent là, mais mon frère continua et obtint même bien plus tard quelques distinctions.

 Un second motif de fréquenter la Targa fut la villa que louèrent nos amis les Podevin.

Arrivés au Maroc comme enseignants dans le début des années 60, et tous deux enseignants au Lycée Hassan II, il avaient trois enfants de notre âge, ce qui fait que les sympathies s'établirent bien vite entre enfants et entre parents. 

Ils étaient aisément identifiables à Marrakech, leur voiture étant une ID bleu ciel, immatriculée dans le Calvados. La plaque terminait par HY 14, ce qui fait que l'identification était sans équivoque. 

Dans un premier temps, ils occupèrent la villa qui se situe dans le jardin Majorelle. Actuellement musée, cette maison d'habitation au sein d'une végétation luxuriante fut pour nous, enfants, un véritable paradis de jeux. Invités le soir, après la fermeture, nous avions toute la superficie du jardin pour courir et jouer à notre guise. Nous disposions ainsi des pelouses, allées et bassins, et nous imaginions au coeur de la nuit d'été marrakchie dans quelque pays exotique suivant les inspirations du moment. 

Ma maladresse me valut, pour la première visite, un bain dans la pièce d'eau remplies de nénuphars en face de la maison, les garçons voulant me montrer les grenouilles, l'accès aux dits batraciens passant par le rebord immergé du bassin dont on avait omis de me signaler qu'il était particulièrement glissant. Je revins donc à la maison penaud et habillé de pied en cap par M. Podevin. 

Les contraintes liées au fait que le jardin était ouvert au public en journée, ce qui les amenait à trouver des visiteurs sur leur terrasse, firent qu'après un certain temps, ils émigrèrent.

 Ils louèrent une propriété à la Targa, qui avait été habitée par Maître Thierry, avocat, dont la fille avait été dans ma classe en quatrième. 

La distance d'avec Marrakech fut résolue par l'achat massif de deux roues motorisés, une mobylette « jaune » et un solex « flandria », dont je me souviens particulièrement bien, ainsi que d'une renault 4 fourgonnette pour mettre le tout éventuellement. 

Cette propriété comprenait une villa conséquente dont je garde peu de souvenirs il faut bien dire et une vaste piscine attenante, ce qui était beaucoup plus intéressant pour un garçon d'une quinzaine d'années. Elle était aussi ceinte d'une orangeraie, entretenue par quelques ouvriers. 

L'entretien de celle-ci faisait partie des charges inhérentes à la propriété. Ce fut la mauvaise surprise, les traitements antifongiques divers ayant passablement entamé le capital de la famille, sans forcément se trouver remboursés à la vente des oranges. Enseignants et fermiers, ce fut une expérience étonnante pour eux. 

De notre côté, nous apprécions la piscine, en fait le bassin d'irrigation puisque l'eau de celle-ci servait avant tout à irriguer les orangers.

 Cette villa était souvent pour nous l'occasion d'un tour en vélo ou vélomoteur, l'éloignement n'étant pas un véritable obstacle et le proximité du club d'équitation où les enfants Podevin, tout comme mon frère, continuaient de pratiquer en faisait une halte intermédiaire intéressante. 

A l'époque, je me déplaçais en Solex, cadeau emblématique de la réussite au Brevet. 

Il m'arriva une mésaventure qui, avec le recul prit toute son ampleur. Un jour que je me rendais à la Targa juché sur mon solex, je fus entouré par une nuée de jeunes marocains conduisant des mobylettes, un peu dans le style de la « chevauchée sauvage ». Ils entamèrent la conversation en me demandant où j'allais, et si je ne voulais pas leur donner mon solex car l'un d'entre eux était juché sur le porte bagages de l'une des mobylettes. Je répondus bien entendu par la négative, et continuai ma route en affichant un sourire crispé et dépourvu d'aménité qui devait passer pour complètement niais. L'encerclement se poursuivant, j'étais en train d'envisager de filer tout droit dans le bas-côté en « tous terrains » (j'étais très fort à ce jeu là) mais la modestie de la cylindrée du solex et l'ambiguïté de cette fuite ne me séduisaient guère. J'empoignai alors le levier de relevage du moteur. J'avais en effet remarqué qu'en allégeant légèrement la pression du galet sur le pneu, le moteur tournait un peu mieux, et il me semblait que je gagnais en vitesse. Sous le regard étonné des jeunes m'entourant, le Solex n'alla pas plus vite, mais le spectacle d'un gamin binoclard juché sur un solex dont il tenait le moteur et qui malgré tout se traînait a dû faire pencher la balance en ma faveur : pourquoi risquer des ennuis en bastonnant un étranger à moitié débile pour récupérer un solex poussif dont le moteur était en train de tomber ? Finalement, ils se consultèrent d'un regard et m'abandonnèrent sur la route d'un coup d'accélérateur. 

En rentrant de vacances, nous apprîmes une nouvelle stupéfiante : bien que locataires, les Podevin avaient été sommés de quitter les lieux toutes affaires cessantes, la marocanisation exigeant que les domaines agricoles ne soient plus détenus ou gérés par des européens. Dans l'été, ils avaient donc dû déménager et se retrouvaient dans deux appartements au cinquième étage en centre ville, dans l'immeuble qui abritait le centre culturel français. Ils mirent du temps à se remettre de cette péripétie, et nous aussi. 

Plus tard, le temps d'un été, j'ai fréquenté la « boule targaouie ». J'étais revenu au Maroc après mon service militaire et nous avions passé quelques jours en bivouaquant chez les Lachèze qui avaient eu l'amabilité et la générosité de nous accueillir. Michel, mon frère, était à l'armée avec Jean-Pierre, le fils aîné Lacheze, et ils étaient venus avec deux copains, dont un à moto. De mon côté, avec deux copines et un copain, nous faisons le tour du Maroc. Cet été-là, la mode était à aller manger les brochettes au « frais », à la Targa. A côte du boulodrome, un petit restaurant servait brochettes et keftas, et c'était agréable de manger en plein air. Nous y trouvions aussi plusieurs « vieux marrakchis », qui, près de vingt ans après l'indépendance, étaient toujours là, attachés à « leur » ville. Dans la nuit chaude de l'été, en plein mois d'août, quelques insectes dansaient autour des ampoules, on respirait mieux qu'en ville. Quelques boulistes faisaient une partie à la lumière des lampes à arc, on y voyait comme en plein jour et la partie était animée. Sur la table, quelques verres d'anisette. Une langue fleurie et modulée, teintée d'intonations pied-noir. On se demandait si, ici, les choses avaient changé depuis les années cinquante.

2 avril 2013

Le voyage de Francine et Man ANA 6

Bonjour chers lecteurs, je devrais ajouter épisodiques car encore une fois j'ai pris le temps entre deux article...Je ne chercherais pas d'excuse non valable pour expliquer mon absence sur le Blog...

Apart le récit de notre ami jacques, je n'avais vraiment pas grand chose à vous raconter...

Mais aujourd'hui, miracle, notre amie des premiers jours, FRANCINE, rentre du maroc et m'a envoyé des photos et des commentaires...J'ai donc du grain à moudre et je me mets devant mon clavier pour vous retrouver...et vous éditer son récit...

Bonjour les amis
Bonnes fêtes de Pâques à tous!!! 
Le 19 mars partie d’Orly par 3°, arrivée à Marrakech... 27 ° et le retour identique!! 26° et Paris le 28 mars avec un petit 3° à l’arrivée!
Résultats :  Rhumes et trachéite, mais j’ai encore la chaleur de mon séjour dans le coeur! j’ai pensé beaucoup à vous car je voyais la météo!!
 
Cependant mon moment près de Kénitra a été aussi bien arrosé et j’ai été très heureuse de retourner dans la ville rouge!
Dany et Annick nous ont baladé pas mal et on a bien profité d’eux!!
 
La circulation à Marrakech ne s’améliore pas!! c’est une catastrophe!! ils passent toujours au rouge!!!!
sur les autoroutes (notamment kénitra Tanger) et si elles sont assez peu utilisées la pratique de l’auto stop y est courante!!!!!!
Maintenant, quelques photos pour vous réchauffer!! (Les commentaires sont de Francine)

koutoubia

Débutons par la KOUTOUBIA

Quelques photos prisent du haut de la Renaissance.

renaissance01

Avec l'ATLAS tout au fond

renaissance

l’immeuble “ gris” sur la gauche de l’avenue est le "Petit Marché"! Il est loin d'être terminé. 

renaissance03

Pour ceux qui n'y sont pas allés depuis longtemps, on voit que maintes nouvelles constructions ont poussé encombrant le paysage.

renaissance04

Sur le toit de la renaissance on rencontre aussi ses amis

Dany et Annick (ils étaient venus au Rendez Vous de Casteljaloux)

renaissanceDanyAnnick

Francine et son amie de toujours MARIA

renaissanceFrancineMaria

Et oui, maintenant sur le toit de notre café de la Place de l'horloge, il y a une piscine...

"Francine  n'a pas osé "piquer une tête"....Elle n'avait pas de maillot"

piscine renaissance

                  Puis, du 20 au 24 mars je suis allée chez mes amis près de Kénitra

K1

Hotel de Ville de Kénitra

K2 - Copie - Copie

Près de chez mes amis là il faisait beau mais ça n'a pas duré.

K3 - Copie (2)

là je suis dans mon élément!!!! la mer!!!!  J'ai pensé aux plages des Landes

K4
 
Asilah!!!! mes amis m’avaient vanté le charme de cette petite
ville balnéaire à 40km environ  de Tanger où il y a beaucoup d’artistes et une médina très étendue mais le temps n’était pas avec nous!!
 
 
 
 
 
Nous en sommes repartis très vite..
 
.K8
 
 
Cette ville a été conquise et par les Portugais et par les espagnols, en voici quelques restes.
K5
 

K6

Deux sortes de tours différentes, qui témoignent des conquêtes successives des Espagnols et des Portugais...

K7

Le marché aux Poissons.

K9

 Le petit port de pêche.

K10

Malgrè la fraîcheur...Un petit tour en barque, escorté par les mouettes...

K11

K12

Pour info:  le Kg de Sar 4 Euros (40 dirhams) la dorade 7 Euros le Kg!
et pour continuer dans les prix: Le Kg de pomme terre “bio” à peine ramassées avec la terre encore dessus 3 dirhams (30 centimes d’euros),
le kg de sardines pêchées une heure avant 12 dirhams le kg (1,20€ ), le
kg d'oignons 5 dirhams (50 centimes d’euros)le  kg de fraises (c’est la pleine saison chez eux 8 dirhams , (80 centimes) à Marrakech 10 dirhams.
Mais qu'elles sont bonnes.
 

03-IMGP5082[2]39

Puis retour sur Marrakech, avec Dany Annick et Maria ainsi que Mustapha ( ami de Francis et Josselyne qui était je crois l’élève des parents
de Francis, instituteurs au Bled) nous sommes allés au Riad qui a bien changé Mustapha nous avait prévu un bon déjeuner salades et brochettes.
un délice!

1-IMGP5066[2]31

2-IMGP5069[5]33

Depuis les dernières photos du Ryad, parues l'années dernières après le rendez vous de Casteljaloux, il a bien changé. Tout est encore plus beau et accueillant. En voici quelques vues actuelles...

08-IMGP5048[2]23

Que c'est bon de se retrouver entre amis, au soleil de Marrakech...

12-IMGP5053[2]21

Vue du Batiment principal

13-IMGP5054[2]22

La piscine. Pas encore en haut, 25° dégrés.... c'est un peu froid pour se baigner à Marrakech

14-IMGP5055[2]24

Dos à la piscine, dans le fond l'entrée principale

15-IMGP5056[2]25

Les bungalows....avec cour intérieures.

17-IMGP5058[2]26

18-IMGP5059[2]27

Le jardin devant l'entrée principale.

19-IMGP5060[2]28

Au Ryad, la cérémonie du thé à la menthe

21-IMGP5065[2]30

Sur la terrasse, avec dans le fond un magnifique panorama sur l'Atlas enneigé.

20-IMGP5063[2]29

Avec Maria, la veille du départ, un petit "resto" sympa en face du Monté Christo.

 

1-IMGP5079[2]35

02-IMGP5074[2]34

Bien sur, à Marrakech, il y a aussi le "FOUQUET'S" mais nous avons préféré rester simples

23-IMGP5070[2]36

24-IMGP5071[2]3709-IMGP5092[2]38

Voila, puis ça a été le départ. L'oeuil mouillé à cause de la séparation, mais quand même heureuse de retrouver mon 'Chez moi, mon JP et VOUS MES AMIS.

 

04-IMGP5093[2]41

Pour le cas où vous auriez des envies de Maroc et de beaux Ryad, voici de nouveau les coordonnées de

Francis et Josselyne Vanoverschelde Allou
www.riad-beloiseau.com
Maroc :
Fr : OO212 (0)6 78 35 18 06 --- JO : 00 212 (0)6 41 64 99 09
France :
Fr: 06 48 53 11 79 --- JO : 06 15 08 80 76
Fixe : 04 95 37 88 39

Maintenant nous allons remercier Francine pour ce beau compte rendu de voyage et lire un paragraphe du récit Man Ana de Jacques.

Il est intitulé MAMAN et il est très touchant. C'et pourquoi je n'en édite qu'un aujourd'hui en vous promettant de ne pas être aussi long pour les suivants...

 

 MAMAN

Maman était professeur de gymnastique à Bayonne, au Lycée de jeunes filles situé à l'époque sur les allées Boufflers, à la place de l'actuel Lycée Paul-Bert. Elle fut nommée à Marrakech en même temps que Papa, en septembre 1961, au Lycée Ibn Abbad.

Ce Lycée était l'ancien lycée français de Marrakech, qui venait d'être marocanisé. Etablissement tout neuf pour l'équipe d'enseignants, mais vieil établissement que ce Lycée Mangin, du nom d'un de l'officier de Lyautey, qui conquit Marrakech en 1912. On appelait cela la « pacification », puis ce fut le « protectorat », termes coloniaux correspondant à la philosophie de l'époque. Le protectorat devait durer jusqu'en 1956, où l'indépendance du Maroc fut reconnue et le Roi Mohammed V revint de son exil à Madagascar. Comme toutes les indépendances, celle-ci connut aussi son lot d'atrocités, égal à celui de la « pacification ».

Le Lycée Ibn Abbad était un établissement plutôt généraliste, au contraire du Lycée Hassan II, lycée technique, où Papa avait été nommé. 

Maman s'y retrouva professeur de gymnastique, la première année, avec un complément de service à l'Arset el Maach, en Médina. 

Elle s'attela avec enthousiasme à convertir les jeunes marocaines à la pratique d'activités physiques et sportives. La séparation des sexes était stricte en ce temps là, car même dans notre Lycée Victor Hugo, les femmes faisaient cours aux filles et les hommes aux garçons. C'était encore plus vrai dans les écoles marocaines. Mais le sport faisait partie de la culture occidentale, et rompre avec les coutumes d'enfermement des femmes était un défi que Maman se plaisait à relever. 

Souvent, en revenant du travail, elle nous racontait des anecdotes sur ses élèves, ses collègues... La vie de professeur confronté à des élèves pour qui à l'époque l'accès au Lycée était une énorme promotion était passionnante. 

Dans ce Maroc de juste après l'indépendance, les opportunités pour les jeunes marocains qui prenaient progressivement la place des français qui regagnaient la métropole était énormes. Les places en Lycée, convoitées, et les perspectives de carrière importantes. Il y avait aussi des déçus, aussi, qui croyaient que les places enviées de ceux qui partaient étaient des sinécures, où l'on pouvait réussir sans travailler, ou qui pensaient plus à la vie de la ville qu'au travail sur des sites disséminés dans le bled. 

Cet écart entre un pays largement pastoral et traditionnel et un modèle de vie occidental et industrialisé était l'un des paradoxes qu'affrontaient tous les jours les élèves. Un illustration nous en fut fournie par une demande que firent ses élèves à ma mère : elles avaient l'habitude de faire gymnastique en maillot de sport et short, en survêtement l'hiver. Un groupe plus déluré que les autres vint un jour lui demander s'il leur était possible de faire la gymnastique en maillot de bain, en bikini par exemple. Ma mère répondit fort diplomatiquement qu'en ce qui la concernait, elle n'y voyait pas d'objection : ses élèves pouvaient venir en bikini, en monokini voire en zéro-kini si elles les souhaitaient, mais qu'auparavant, il faudrait aussi qu'elles réfléchissent aussi à la façon de s'habiller dehors où elles s'empressaient de revêtir djellaba et voile (ce voile marocain, en tissu très fin et que l'on porte sous la capuche de la djellaba). 

Porteuse d'espoirs, de doute, d'analyse et de recul, elle était très appréciée de ses élèves. Celles-ci le lui rendaient bien, me semble-t-il. 

Malheureusement, sa santé se détériora. Les premières années, alors que nous habitions avenue Hassan II, le Docteur Landos, qui avait son cabinet en face de notre villa, diagnostiqua une hépatite virale, qui l'obligea à suivre un régime sévère. 

Son état n'évolua pas aussi bien qu'elle l'aurait souhaité, et un diagnostic d'hypercholestérolémie fut prononcé. La chirurgie cardiaque n'avait pas fait les avancées spectaculaires que nous connaissons actuellement, et l'hérédité aggrava progressivement ce phénomène. Progressivement, elle dut se résoudre à ne plus nous accompagner dans nos voyages dans le sud. 

J'étais parti en France et attaquais ma seconde année à l'université de Bordeaux, en 1969, quand elle fit un premier infarctus. 

Mais comme j'étais loin, que j'avais besoin de toute mon énergie pour des études qui étaient importantes, les parents décidèrent de faire le black-out sur cet épisode, et il fallut que je rentre à Marrakech ce noël 1969 pour apprendre ce qui s'était passé, et pourquoi ma mère n'avait pas pu répondre à certains de mes appels téléphoniques, à une époque où il fallait passer par une opératrice pour demander l'international. 

C'était à chaque fois une heure d'attente pour trois ou quatre minutes de téléphone. Mes filles sont incapables d'admettre aujourd'hui que l'on puisse se dire quelque chose en si peu de temps, mais c'était aussi une réalité.

Après un voyage Bordeaux – Casablanca mouvementé, qui me fit arriver en réalité à Marrakech pour cause de météo défavorable suite à six heures de retard, je retrouvai donc une maman alitée, économisant ses mouvements, fatigable, mais heureuse de me revoir et contente de vivre. 

Comme toujours, elle privilégia ses enfants et consentit à ce que nous allions faire le relevé des gravures de Mrimima avec les Letan. Papa ne nous accompagnerait pas cette fois, l'état de santé de Maman le lui interdisait. et c'est la raison pour laquelle nous partîmes avec M. Podevin. 

Nous rentrâmes comme à l'accoutumée, sales et poussiéreux, et préparâmes le réveillon qui devait se dérouler en famille quelques jours plus tard.

Dans la soirée, je résolus d'aller jusque chez Martin, la librairie, voir si je lui trouvais en livre pour lui offrir. Elle lisait beaucoup, il n'y avait pas de télévision à la maison, et dans bien peu de maisons à l'époque d'ailleurs. 

Je n'avais pas trouvé de livre vraiment intéressant et c'est plus pour moi que pour elle que je choisis le livre de Christian Zuber, alors conférencier à « Connaissances du monde » et que nous avions vu à Marrakech, « Caméra au poing ». L'histoire de ses débuts dans le reportage animalier. Il s'illustra plus tard à la télé française en finissant par prendre une place excessive, par seulement dans la découverte des animaux mais aussi dans une certaine campagne électorale. 

Je rentrai donc à l'appartement, et trouvai mon père dans tous ses états, me demandant d'appeler de toute urgence le docteur qui soignait Maman. Elle venait de faire un second infarctus et était mourante. 

L'appel au médecin fut pris par sa secrétaire, à qui nous fîmes bien comprendre l'urgence, mais le docteur était en déplacement et il n'y avait pas grand monde de joignable ce 31 décembre à 17 heures. En tout cas, à l'époque au Maroc, pas de services d'urgence. 

Impuissants, nous ne pouvions qu'assister à l'insoutenable. 

J'appelai mon frère qui était en bas dans engagé dans un match de foot acharné qui barrait la route en terre qui passait en bas de l'immeuble, et nous pûmes faire un dernier adieu à Maman qui venait de nous quitter à 52 ans. 

J'avais 19 ans, mon frère 14, et une grande partie de notre enfance disparut ce jour là. 

Le lendemain, notre fidèle bonne, Chouma, se présenta à la maison. Elle aimait énormément Maman, qui avait toujours eu pour elle des attentions multiples. Salaire convenable, argent pour aller voir le médecin quand elle était malade, petits cadeaux pour ses neveux à chaque fête de l'Achoura, cadeaux de France systématiques à chaque retour de vacances car nous savions qu'elle était passée arroser les plantes durant l'été dans l'appartement. La qualifier de « bonne » était d'ailleurs injuste, tant elle faisait partie de la maison, tant elle veillait sur mon frère et moi quand nous restions seuls à faire des bêtises le jeudi matin où nous n'avions pas cours, avec fermeté mais extrême bienveillance. « Lé dis à Maman », disait-elle à chaque fois que nous exagérions dans le désordre. Elle ne le dit jamais, bien sûr... 

A peine la porte déverrouillée, que Papa lui expliqua ce qui s 'était passé en éclatant en sanglots, auxquels elle se joignit avec cette plainte caractéristique de la mort que connaissent bien tous ceux qui ont vécu au Maroc. Elle rentra chez elle, incapable de travailler, et nous incapables de lui donner du travail. 

Nous eûmes le bonheur de compter sur la solidarité de nombreux amis qui se relayèrent pour nous visiter, pour veiller aussi. Papa était effondré, nous étions un peu moins atteints avec mon frère. 

Comme Maman était morte le 31 décembre, un vendredi, il fallut attendre trois jours pour que les obsèques puissent se dérouler. 

Ce jour-là, M. Marcellesi nous emmena tous trois au cimetière de Marrakech, pour une inhumation temporaire en attendant le rapatriement du corps sur la France. Son aide et celle de tout le consulat nous fut précieuse.

 Quelle ne fut pas notre surprise, en arrivant en bas de l'escalier derrière ce cercueil, de voir tout l'espace devant l'immeuble, jusqu'à la route de la Targa et même un peu delà, noir de monde.

Nous ne réalisions pas combien Maman était connue et appréciée d'une bonne partie de Marrakech, où nous résidions depuis neuf ans, et nombre de collègues, d'élèves, d'amis étaient là. 

Ce fut ensuite l'épreuve de la mise en caveau, et le défilé de plusieurs dizaines de personnes qui nous embrassèrent avec toute la sympathie et toute l'affection que l'on porte, dans des pays somme toute méditerranéens, aux familles dans ces circonstances. 

  

portrait

Portait de Maman réalisé en 1967 par Stéphane Magnard.

Nous rentrâmes anéantis et je laissai mon frère et mon père seuls peu après pour revenir en France et retrouver mon oncle, et une partie de la famille et des amis qui me pressèrent de questions, et m'entourèrent aussi de leur affection. 

Dans l'avion qui me ramena en France, je ne fus pas un bon voisin pour l'Italienne fort affable qui voulut à tout prix entretenir une conversation mondaine avec moi tout en faisant la traduction simultanée à son mari. C'était un couple somme toute aisé qui était venu réveillonner dans un hôtel de luxe, et rentrait sur Turin. Le tourisme pointait le bout de son nez à Marrakech.

 Voila chers amis lecteurs, je reviendrai très bientôt avec quelques chapitres supplémentaires. En attendant restez en bonne santé et pensez à m'envoyer tout ce que vous avez à nous montrer. Bonne semaine. Votre toujours MICHEL

18 février 2013

Carnaval à SERRIG et MAN ANA 5

Bonsoir mes amis lecteurs, voila je suis de retour. De toute façon je ne peux pas vous abandonner, puisqu'il y a encore des tas de pages du récit de Jacques à vous éditer.
Mais avant je voulais vous signaler que nous avons eu à la suite du dernier article, deux demandes d'aide.

Une provenant de Geneviève qui recherchait (je le mets au passé, car grâce à Marcel la recherche a déjà abouti) son amie d'enfance Réjane et l'autre de Pierre de Chancel qui après avoir lu un article de 2009 a découvert qu'il avait peut être une nièce qu'il ne connaît pas. Pierre habite encore à Marrakech, mais il est né à Safi. Pour l'aider j'ai transmis sa demande à Michel2M qui semble avoir les renseignements nécessaires pour satisfaire Pierre.
Notre Blog a donc encore une fois bien rempli sa fonction... Merci à ceux qui ont répondu à ma demande d'aide, même s'ils n'avaient pas connu Réjane ou Pierre.

Sinon.... En Allemagne, comme partout ou l'on fête Carnaval, nous avons eu notre défilé à Serrig. Bien sur, c'est un petit village et le défilé n'a rien à voir avec celui de Cologne, de Dusseldorf ou de Mayence, qui dure deux heure et sont long de plusieurs kilomètres.

Nous n'avons eu que 17 groupes, fanfares, chars et groupes à pieds, mais l'ambiance était là et le public aussi. Je vais vous montrer quelques photos prises cet après midi du Mardi gras

2013Karnaval (3)

2013Karnaval (5)

2013Karnaval (9)

La rue se rempli des villageois

2013Karnaval (11)

La fanfare ouvre le défilé

2013Karnaval (13)

Les premiers groupes à pieds se présentent, lançant des friandises aux enfants.

2013Karnaval (20)

Ma voisine

2013Karnaval (26)

2013Karnaval (27)

puis quelques chars

2013Karnaval (34)

La garde royale

2013Karnaval (40)

2013Karnaval (42)

Les Bisounours

2013Karnaval (43)

Un groupe de femmes qui dansent

2013Karnaval (47)

Les Vieux dansent aussi

2013Karnaval (48)

Puis le Roi s'approche

2013Karnaval (50)

Pour saluer la foule de ses sujets.

2013Karnaval (55)

Quand les grenouilles se transforment....

2013Karnaval (56)

en Princesse

2013Karnaval (59)

Mon voisin dirige le groupe des "Beaux gosses"

2013Karnaval (60)

2013Karnaval (62)

entouré de ses danseuses

2013Karnaval (63)

Voila la garde Princière

2013Karnaval (65)

qui ouvre la route au couple princier du Village de Serrig

2013Karnaval (67)

Ils sont suivi par les membres féminins de sa Garde

2013Karnaval (72)

Une mignonne petite participante au défilé qui donne des bonbons aux autres enfants...

2013Karnaval (71)

Vers la fin du défilé, les jeunes Princesse et Prince de cette année.

2013Karnaval (7)

Ca y est, le défilé se termine, les spectateurs se regroupent autours des braseros, près des stands de saucisses et de bière et se réchauffent en buvant des boissons chaudes...

Maintenant je vais terminer l'article d'aujourd'hui sur une note plus grise, plus triste et que je n'aurais jamais voulu faire paraître... Je vous laisse seuls juges....

arnaques149

Place à Jacques et à la suite de son récit....

Le bac, ce fut en juin 1968. Et avant, il y eut le mois de mai ! 

Mai 1968 ! Pour beaucoup, ce sont des images de barricades et de charges de CRS, images en noir et blanc d’un Paris que nous ne connaissions que peu. 

Pour nous, adolescents exilés à Marrakech, élèves de terminale, la tourmente parut bien lointaine. La prise de conscience politique du lycéen de terminale au Lycée Victor Hugo était toute relative, et ce décalage nous isolait de la compréhension de ce qui se passait. 

Mon 1968, ce fut avant tout l’année de mon bac.  

Du « père-cent » tout d’abord. 

Pour la première fois, mes parents m'autorisèrent à sortir pour assister à cette soirée. Jusqu'alors, cela avait été un long combat, dans le style « pas avant 17 ans » (pourquoi 17 ?) ou « passe ton bac d'abord ». Avec une exception notable à la soirée du foyer du Lycée Victor Hugo, l'année précédente. Mais là, c'était du sérieux, c'était en Médina, et cela durerait toute la nuit... ou presque. Rite initiatique incontournable du lycéen des années soixante.  

Le père cent fut organisé cette année-là dans un Riad, grâce à Jamal Stitou, élève de terminale C au Lycée Vitor Hugo, me semble-t-il.

Francis Vanoverschelde, copain de classe, avait son permis de conduire et il se proposa d'emmener une fournée de jeunes dans la voiture paternelle, une Fiat 1800. 

Arrivés place Djemaa el fna, un service impeccable fit que nous fûmes identifiés immédiatement par un jeune enfant qui nous servit de guide jusqu'à un mur chaulé dans lequel s'ouvrait une porte en bois clouté. Celle-ci franchie, une petite cour d'entrée et deux portes plus tard, nous nous retrouvions dans un vaste patio, bordé de salons marocains avec banquettes et tables basses destinées à nous recevoir pour le repas. 

La soirée était animée par un orchestre dont la plupart des membres fréquentaient le Lycée dont me semble-t-il Albert Benhamou. Je ne leur connaissais pas ce talent. Peu à peu, le salon se remplit et j'eus la surprise d'identifier notre professeur de dessin Stéphane Magnard et un moniteur de l'Aéro-Club. 

Les musiques de l'époque défilèrent tout au long de la soirée, et la pause de l'orchestre fut occupée par Kherbane qui nous joua quelques morceaux de son répertoire. Une soirée sage, somme toute, même si le piment de la nouveauté et le décalage du rock en Médina en accentuaient l'étrangeté. 

Puis nous parvint de France le bruit d’une agitation croissante. Les échos nous en parvenaient par les ondes de France-Inter, que nous captions tant bien que mal la nuit tombée sur le poste de radio Telefunken, qui attaquait gaillardement sa huitième année de bons et loyaux services, son « œil magique » vert clignotant au rythme du fading des grandes ondes. Les ratés dans l’arrivée des journaux (en fait la censure), nous en avions l’habitude. Mais les journaux ne revinrent pas, puis enfin la radio se tut. La grève générale atteignit tous les média. Plus de nouvelles de France, « le petit marocain » donnait quelques nouvelles de l’international en page 3 ou 4, les une et deux étant réservées aux cérémonies de réception des dignitaires par Sa Majesté le Roi. 

Je me souviens avoir un jour ramené triomphalement de chez Chatr (le libraire successeur de Martin, Avenue Mohammed V, ou était-ce encore Martin ?), un numéro de TIMES MAGAZINE qui faisait un point sur les « évènements », la « french revolution »…

World: FRANCE ENRAGEE: The Spreading Revolt

times

Couverture ajouté par l'animateur du Blog. cad moi même

Je crois que ce jour là mon père m’a traité de « petit con » parce que ce que j’avais compris était assez proche de la réalité, mais pas trop, et surtout très éloigné de ce qu’il aurait aimé qu’il se passe et que je comprenne , sans que j’aie jamais pu savoir s’il regrettait un passé de communiste révolutionnaire, s’il critiquait les idées de révolution irréaliste des mao-spontex et autres trotskystes, ou si des années de « Paris Match » et « France Inter » n’avaient eu de l’influence sur notre perception de ce qui se passait en métropole… 

Ce dont je me souviens surtout, en cette période charnière de ma vie parce qu’elle devait marquer le départ de Marrakech pour aller faire mes études à Bordeaux, c’est de la désorganisation complète des examens, et donc du bac, qui s’est traduite par une disjonction des épreuves pour les « marocains » et les « européens ».  

Les premiers passeraient un examen écrit, traditionnel, les autres un examen uniquement oral à Rabat. La séparation d’avec nos camarades de classe, qui faisaient partie de notre quotidien, fut brutale, radicale, et bien souvent définitive. Après le bac, tous dispersés dans les universités, je ne devais plus revoir la majorité de ceux qui avaient été mes compagnons d’études pendant sept ans. 

Nous fûmes donc libérés de l’obligation de suivre les cours (il y avait aussi un peu de flou chez les enseignants) et commençâmes à potasser le bac entre nous.  

Entre voisins, nous avions naturellement opéré des regroupements stratégiques et des alliances objectives, et nous voilà avec Jacques Angelou (9 Rue Lamure, 4ème étage) occupés à réviser dans la touffeur du mois de juin, où dès 11 heures du matin, les fenêtres fermées permettaient de ne pas trop dépasser les 27 ° dans l’appartement. (Son frère Marc, qui passait aussi le bac, révisait avec quelques copines me semble-t-il – mais il y a prescription). Comme, chez lui, il y avait un climatiseur (rarissime en 1968), nous « bossions » au frais dans sa chambre et dans son salon.  

Il y a eu, je ne sais, une quinzaine de jours je crois, de bûchage intégral. Rythme d’enfer, matières par demi-journées, quelques cours de maths rapides avec mon paternel, dont je faisais le désespoir parce que j’étais scientifique mais pas matheux.  

Il y eut cependant l’intermède des week-end. Cette année là, nous avons dû aller une ou deux fois à Souira Kedima. Une vingtaine de kilomètres au sud de Safi, à l’embouchure du Tensift, le vieux fort portugais marquait toujours la fin de la côte rocheuse et le début d’une anse de sable doré. Quelques rochers au large protégeaient un peu de la houle. Ce petit coin agréable était cependant en train de se transformer. Avec l’arrivée du complexe chimique de Safi, une nouvelle végétation apparaissait, des concrétions calcaires envahissaient les rochers et les moules sauvages provoquaient de des incidents gastriques fâcheux. La pollution sauvage était en marche. J’espère que depuis des mesures ont été prises pour y mettre fin.  

Il n’y avait pas encore le camping, ni même les résidences qui sont en train d’y être construites. Pour nous, il s’agissait de dormir une fois de plus sur la plage, sous la tente bleue qui avait déjà fait le sud marocain en long et en large, de Mogador à Tarfaya et de Foum el Oued Dra à Erfoud. Le vent y était frais, mais interdiction de rester trop longtemps au soleil, pour ne pas attraper un des ces effroyables coups de soleil marocains. 

Finalement, le bac serait organisé de façon orale à Rabat, à 350 km de Marrakech quand même !

Une solution d’hébergement avait été trouvée chez des amis des Angelou : nous mettrions la caravane de la famille Angelou dans le jardin.  

Départ donc en voiture, la caravane à essieu rigide suivant tant bien que mal et ayant tendance à vouloir passer devant la voiture dès 60 km/h, après quelques balancements. 

Marc, le frère aîné de Jacques, possédait et le permis de conduire et la dextérité nécessaires pour manipuler l’attelage. Expédition, à l’époque et par ces températures, il s’agissait de partir tôt pour arriver vers Settat avant la montée de la chaleur, et surtout éviter de four de la plaine de Benguerir.  

Arrivés enfin à Rabat, au frais, nous allâmes faire une reconnaissance, afin de ne rien laisser au hasard. Nous dormîmes mal, et ce ne fut pas à cause de la chaleur, mais de l'énervement. 

Puis ce fut le grand matin, la montée à l’assaut de la colline au sommet de laquelle se trouvait le lycée Descartes.  

Le hasard des listes alphabétiques faisait que nous passions tous le même jour, mais dans trois jurys différents. Je me rappelle seulement que nous en avons profité pour proposer fort civilement à deux jeunes (blondes et charmantes, bien sûr) lycéennes Rbatias de les emmener là-haut, et que la conversation pour détendre l’atmosphère a été :

- Vous allez passer le bac ?

- Oui.

- C’est la première fois ?

- « Oui » rougissant de la plus blonde.

- « Ben moi, c’est la dernière » ai-je fanfaronné.

Cela a détendu l’atmosphère qui en avait bien besoin. 

En fin de journée, éreintés d’être passés par les interrogatoires sourcilleux en anglais, mathématiques, français, physique, sciences naturelles, nous avons tous été reçus. Sauf qu’à Rabat, cette année là, le taux de réussite fut très loin des 80% métropolitains, et plus près de 50 %. Mais je n’ai jamais pu le vérifier.  

Coup de téléphone à Marrakech, où le fait que nous soyons tous reçus a résonné dans l’immeuble pendant toute la soirée. Joie des parents, qui s’étaient mis dans la tête qu’il y aurait bien un collé et que la joie des uns serait ternie par le souci des autres. Eh bien non ! La totale. Le petit nuage ! 

Le lendemain, remis de nos émotions, nous sommes repartis vers Marrakech dans l’Opel break remorquant la caravane. A chaque départ en roulis, un coup de frein énergique domptait la bête et évitait certainement de se retrouver couchés sur le flanc sur la route… 

Evidemment, à 60 km/h, en plein après-midi et tractant la caravane vers Marrakech, on a atteint plusieurs fois la zone rouge du thermomètre de la voiture, d’où arrêt en rase campagne pour laisser « refroidir ».

On en profitait pour griller une cigarette, essayer de capter une musique américaine sur l’auto radio de la voiture, regardant passer un camion… Mais nous étions bien seuls. De nos jours, entre air conditionné, GPS et téléphone portable, en ne peut qu'imaginer ce qu’était la route à l’époque. Benguerir et les Djebilet franchis, nous eûmes la Koutoubia en vue, dans la poussière du traditionnel coup de vent du soir. 

Ce fut le pont sur le Tensift, la palmeraie, puis enfin l’avenue de Casablanca à 40 km/h, le rond-point du consulat, et nous prîmes à droite la route de La Targa.

Juste avant le petit marché, à l’abri de trois faux poivriers, le parking de l’immeuble, à l'ombre, nous accueillit…

Le reste devient flou, car au frais du climatiseur, une ou deux bouteilles de « Mumm » cordon rouge importé par la valise diplomatique (Madame Angelou travaillait au Consulat) ont été descendues par les héros du jour, leurs frères et sœurs et leurs parents. Jacques Angelou répétait à sa mère : « tu vois, maman, tu l’as eu mon bac ! », mon frère faisait la gueule, il n’avait eu que son brevet, ma mère trouvait que je « regardais drôle » Dominique, la sœur de Jacques et Marc, mon père n’en revenait pas...

On s’est tous pris un bon coup dans le nez, on rigolait de tout...  

La vie d’étudiant commençait, il faudrait quitter les copains et les copines en septembre ou octobre, on ne savait pas tant la situation était encore confuse. 

C’est en septembre, avant de partir faire mes études à Bordeaux, que des cousines et nièces de coopérants en visite à Marrakech m’ont initié à la politique, amené à approfondir la libération sexuelle et autres choses qui allaient vraiment prendre de l’importance dans le futur.  

Ensuite, ce fut l’avion, le saut dans le froid, les 250 élèves de première année de fac de biologie (on n’a jamais vu cela, mon cher, où allons-nous ?).

Mon mai 68 à moi, je l’ai fait en novembre 68, quand j’ai dû apprendre à décrypter les affiches caricaturant les CRS, critiquer le pouvoir gaullien qui avait vacillé, rencontrer des mandarins… Tout un vocabulaire dont le séjour à l’étranger nous avait privé.

Mrimina avec Letan

 C'est en novembre 1968 que reprirent les cours à la fac de Bordeaux. Il avait fallu attendre la fin des examens dont première et seconde session s'étaient déroulées en septembre, et le temps de tout corriger nous étions début novembre. 

Etant parti si tard, je ne devais pas revenir à Marrakech avant pâques suivant, et passai Noël chez nos amis Testemale au fin fond de la Dordogne, dans une ferme où, entre enfants et amis, nous étions une bonne quinzaine de jeunes. Noël sous les tisons, car nous vécûmes une vague de froid mémorable avec chute de neige, gel de toutes les mares et canaux alentour, et blocage des routes par le verglas.

Les palmiers marrakchis étaient très loin ! 

C'est à Noël suivant que notre programme de voyages dans le sud reprit.

Ayant été initiés à la préhistoire par notre ami M. Letan, nous avions découvert à Mrimima un site de gravures rupestres très important. Il est vraisemblable qu'il avait échappé aux inventeurs car utilisant une roche peu propice a priori à recevoir des gravures. Au lieu des grès rosés fins que nous avions vus vers Akka et Tata, qui donnaient lieu à des représentations de type saharien, stylisées, la facture était ici piquetée sur des roches dures et très magnétiques, des gabbros.

Il convenait d'en faire un relevé scientifique exhaustif, un corpus comme on dit dans l'archéologie.

Cela prendrait bien deux ou trois jours, et il fut décidé que l'intervalle entre Noël et le 31 décembre serait utilisé à cette fin. 

Maman était malade, aussi Papa ne pouvait-il pas se déplacer. Par contre, mon frère et moi étions disponibles, et cela nous changerait les idées plutôt que de rester à Marrakech à tourner en rond. 

Il fut donc convenu que M. Podevin viendrait avec nous. Il pourrait conduire la jeep aussi bien que moi, en tout cas sur le goudron. Cela faisait belle lurette que Michel, mon frère (et moi-même, avant de passer le permis), conduisions sur piste. Mais, même (et surtout) au Maroc, il valait mieux avoir le permis sur route goudronnée.

Mon permis français, tout neuf, m'armait peu pour négocier les 100 km de virages du Tichka, aussi Papa préférait-il que nous soyions accompagnés par un adulte. 

Pour des raisons de timing, les Letan venant de Casablanca et partant un jour plus tard avec l'ID, nous partîmes avec la Land en premier. Le point de rendez-vous était à Mrimima, dans l'oued derrière les collines. Nous avions déjà repéré l'endroit. 

Trajet sans histoire jusqu'à Tazenakht, et à la sortie, au début de la piste vers Foum Zguid, l'inévitable oued qui sortait d'une première crue. La Land-Rover se joua de l'obstacle, et nous parvînmes à Foum Zguid sans encombre.

Nous fîmes le plein d'essence au souk, chez l'épicier que Stéphane Magnard avait fini par surnommer « Dimitri », par analogie avec un autre commerçant célèbre dans la région. Le vrai Dimitri était une de ces figures comme le sud marocain connaissait. Grec de nationalité, il avait réussi à créer un petit commerce d'épicerie, puis à fournir tout ce qui était possible à la communauté européenne aux alentours de Ouarzazate. Il avait bien réussi, et dès que l'on voulait quelque chose que l'on ne trouvait pas dans les souks, un tour à l'épicerie de Dimitri permettait de le trouver. Un peu comme le Senhor Oliveira da Figueira de Tintin dans « Les cigares du pharaon », il avait de tout, et il aurait pu tout nous vendre.

Par similitude, le petit épicier de Foum Zguid avait reçu le nom de « Dimitri de Foum Zguid », ce qui le faisait bien rigoler. 

Les pleins refaits, nous repartîmes vers Mrimima, à une quarantaine de kilomètres au Sud Ouest de Foum Zguid, quittâmes la piste en direction d'un petit col dans la crête rocheuse noire et atteignîmes le lieu prévu pour le bivouac, un lit d'oued asséché semé de quelques tamaris que nous apprécierions quelques années plus tard. 

La tente fut bientôt montée, et nos amis Letan se firent attendre. Bon, nous supposions qu'ils avaient été retardés par l'oued que nous avions franchi le matin même et qui, contrairement à son habitude, coulait. 

La nuit se passa sans problème, et nous résolûmes d'attendre le lendemain midi pour prendre une décision. La matinée se passa à repérer les principaux sites de gravure par une exploration extensive de la crête, son balisage tous les cent mètres avec des cairns pour servir de repère, et nous pûmes retrouver la plupart des oeuvres remarquables. 

C'est en fin d'après-midi qu'un nuage de poussière caractéristique nous signala l'arrivée de l'ID bleu ciel. Ils avaient effectivement été bloqués par l'oued, et dû attendre une décrue et le passage de deux ou trois véhicules poussés à bras pour éviter de noyer le moteur avant de pouvoir traverser. 

Leur tente dressée, Madame Letan insista pour que nous prenions le repas sous leur tente, alors qu'un vent assez fort soufflait dans le lit de l'oued.

Après le repas, nous discutions tranquillement en écoutant les rafales du vent du sud faire battre la toile de tente et nous expliquions aux Letan que Papa nous avait raconté que dans les Pyrénées il avait essuyé des vents d'orage fort violents avec sa tente canadienne, et que c'étaient alors les mâts qui pliaient.

Une bourrasque plus violente que les autres illustra à cet instant précis notre propos : la mât ploya et nous nous retrouvâmes empêtrés dans la toile qui flottait sous le vent. 

M. Letan était ingénieur dans les mines, et possédait tout un tas d'accessoires étranges qui lui permirent de réparer tout cela rapidement : un autre tube d'aluminium, une clé auto bloquante, quelques tours de « scotch 33 », cet adhésif isolant électrique qui servait à peu près à tout en production industrielle, de l'isolation des fils électriques à la réparation des fuites d'eau, et le tour fut joué. Ceci confirma l'extraordinaire résistance des tentes modernes à quatre pans, comme celle que nous utilisions depuis plusieurs années.

Le lendemain, nous nous mîmes au relevé archéologique, photographiant chaque gravure avec une indication de l'orientation, et reportant la référence sur une carte en papier millimétré. Cette technique peut faire sourire les « vrais » archéologues, ceux qui faisaient des relevés sur papier calque et pour lesquels la difficulté était d'épouser la rotondité de la roche, mais en un jour et demi, nous eûmes terminé ce travail d'inventaire et rentrâmes sur Marrakech. 

De très mauvaises surprises nous y attendraient.

Publicité
<< < 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 20 30 40 > >>
Notre marrakech 45-70
Publicité
Publicité